Panat in postcardThe Ranums'

Panat Times

Volume 1, redone Dec. 2014

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/177/ De Paris le 4 mars 1650

La semaine passée l'on sceut icy les particularités de la reception qui a esté faitte à M. de Vendosme dans Dijon, lesquelles sont à remarquer. Ce duc, y arrivant, pretendit y estre receu avec les mesmes honneurs qu'on avoit tousjours rendu à M. le Prince, ce qu'il obtient par la brigue contraire à celle du Premier President, et feut receu par deux presidentz et 16 conseillers; avec lesquelz estant entré au Parlement, il fit une tres belle harangue sur le subject pour lequel il estoit envoyé; et l'on remarqua qu'ayant dit, entre autres choses, qu'il estoit venu pour deslivrer ces messieurs de l'oppression dans laquelle ilz avoint esté jusques icy, le Premier President l'interrompit, luy disant qu'ilz n'avoint point souffert d'oppression pandant le gouvernement des 2 princes et qu'au contraire ilz avoint tousjours respiré. Ensuitte ce duc receut les clefs du chasteau de cette ville là de la main du sieur de Comeau, lequel y commandant alternativement avec le sieur de Bussiere, estoit alors dans le temps de son commandement et n'avoit pas voulu laisser entrer celuy cy, afin qu'il ne l'empescha pas d'executter le traitté qu'il avoit faict avec ce duc de luy rendre la place, moyenant x mille livres qu'il receut pour cest effect, pretendant que cette somme luy estoit deue. La ville de Dijon a offert 50 mille escus au Roy pour obtenir la demolition de ce chateau, laquelle l'on ne leur veut pas accorder à moings de 200 mille escus.

L'on a changé toutte la garnison du Bois de Vincennes. M. le Prince est avec M. le prince de Conty dans une mesme chambre, mais ilz n'ont aucune communication avec M. de Longueville ny avec M. Perraut, qui sont dans une chambre à part.

Le 25 du passé le duc de St Simon partit d'icy sans prendre congé de la Cour et s'en alla en son gouvernement de Blaye. Quelq'ungs veulent qu'il aye escript à la Reine qu'il s'estoit retiré sans congé, voyant qu'il n'y avoit point de seurté pour les serviteurs de M. le Prince, et qu'il avoit apris qu'on faisoit des preparatifs pour surprendre la place par ordre de la Cour. Le comte de Daugnon donne aussy de la jalousie la Cour à cause du mariage que M. le Prince vouloit faire de luy avec Mme de Chastillon.

M. de Chavigny est aussy parti de Paris incognito dès le commencement de la semaine passée. Il estoit encor suspect à cause de M. le Prince avoit obtenu permission pour luy de revenir en cette ville pour solliciter ses affaires.

Le 26 M. le Cardinal visitta M. le duc d'Orleans et Madame et les remertia de l'honneurs qu'ilz avoint faict à ses niepces de les souffrir dans leur palais. Cette visitte fait croire qu'il n'y avoit plus de froideur entre eux. S.E. sortant rencontra le duc de Candale dans la cour de ce palais et s'entretient longtemps avec luy en particulier, comme firent peu apres MM. de Beaufort et Broussel avec S.A.R.
/177v/ Le mesme jour plusieurs cappitaines suisses feurent veoir M. le duc d'Orleans et luy dirent qu'ilz venoint prendre congé de luy et qui [qu'ilz] seroint desja party il y a un mois pour s'en retourner en leurs pays, n'estoit le respect qu'ilz doibvent à S.A.R., laquelle leur fit response qu'elle feroit son possible pour leur faire donner satisfaction et les pria de se donner un peu de patiance pour veoir s'il y auroit moyen d'accommoder leurs affaires; à quoy ilz repartirent qu'ilz avoint ordre de partir le premier de mars et que si on ne leur donnoit satisfaction pour ce qui leur est deubt, ilz ne pourroint pas empescher que tous les Suisses qui sont dans l'armée du roy prissent part allieurs.

Les deputtés de Bourdeaux sont attendus icy pour faire leurs remonstrances contre M. d'Espernon sur l'inexecution de la paix. Le Conseil a cassé l'ordonnance que M. d'Espernon a faicte pour l'imposition de 200 mille livres qu'il vouloit lever dans son gouvernement pour se rembourcer des frais qu'il a fait à la guerre de Bordeaux.

Le 28 l'abbé de Richelieu eut une conference de deux heures avec Mme d'Esgullion, sa tante: laquelle estant solicittée par l'abbé de Boisrobert de vouloir approuver le mariage du duc de Richelieu, luy respondit qu'elle estoit entierement resolue de le faire casser, de pousser l'affaire jusques au bout, et faire pendre Des Marais; à quoy cest abbé luy ayant reparty qu'elle devoit s'adoucir par l'amitié qu'elle portoit à Mme de Vigean, elle repliqua là dessus que si Mme de Vigean luy en parloit, elle remproit l'amitié qui est entre elles; ce que celle cy ayant entendu, dict à cest abbé qu'elle aymoit mieux veoir perdre l'honneur de sa fille que le sien, qui estoit interessé dans la rupture de ce mariage pour ne paroistre pas ingratte envers Mme d'Esgullion, qui a faict la fortune de la maison de Vigean.

Le mesme jour M. le Cardinal fit 4 visittes qui ont esté fort remarquées: la premiere à M. de Beaufort, la 2 à M. le Coadjuteur, la 3 à Mme de Montbazon, et la 4 à Mme de Chevreuse, ce qui a donné belle matiere de parler.

La Reyne et S.E. parlerent ces jours passées à S.A.R. du restablissement de M. l'abbé de la Riviere, mais elle jetta fort long cette proposition; et ainsy on se trouve bien empesché de faire consentir Sadite A. aux choses qu'on voudroit tirer d'elle. Elle est resolue de n'avoir plus de favory particulier et de faire tout elle mesme. Pour cest effect l'on a remarqué qu'elle ce [se] fit apporter ces jours passées l'estat de sa maison, qu'elle garde, et se faict rendre conte de touttes ses affaires jusques à disposer elle mesme par ses mains de l'argent de ses menus plaisirs. Cest abbé est tousjours dans sa maison de Petit Bourg.

/178/ Depuis le retour de Leurs M., M. le duc d'Orleans ayant tesmoigné souhaitter le restablissement de M. le garde des sceaux de Chasteauneuf, le fit resoudre au Conseil le premier du courant. Il en avoit esté sollicité pandant l'absence de la Cour par M. de Beaufort et Mme de Chevreuse. Aussytost apres cette resolution S.A.R. envoya le baron des Ouches à Monrouge pour porter la nouvelle à M. de Chasteauneuf, et en mesme temps la Reyne envoya M. de la Vrilliere, secretaire d'Estat, à M. le Chancellier pour luy demander les sceaux, lesquelz il rendit sans faire aucune difficulté; mais comme il estoit au lit malade, cette nouvelle ne contribue pas à sa convalescence. Le 2 au matin M. de Chasteauneuf receut grand nombre de visites à Montrouge, où l'on alloit se conjouir avec luy de son retour; et le soir du mesme jour il arriva en cette ville et fut aussytost saluer Leurs M., qui l'ayant fort bien acceuilly, luy mirent les sceaux entre les mains, et l'on tient Conseil en mesme temps dans lequel il eut sceance inmediatement apres M. le Cardinal. L'on n'a pas peu luy accorder la qualité de chancellier qu'il demandoit conformement au brevet qu'il en avoit eu, parce qu'on n'a pas peu depossedder M. Seguier. Quelq'ungs veulent qu'il n'aye accepté les sceaux que parce qu'il les avoit auparavant, et que comme il se soucie fort peu de les garder, il doit s'en deffaire dans quelque temps. En ce cas on croit que le president de Bellievre y aura bonne part. A la sortie du Conseil M. le Cardinal caressa fort M. de Chasteauneuf, apres quoy il le pressa extraordinairement d'aller loger dans le Palais Mazarin jusques ce qu'il en eut trouvé un qui luy feut commode; mais il s'en excusa fort civilement et feut loger ches le marquis de Neufville, son nepveu; mais hyer au soir la Reyne luy ayant encor dit qu'il falloit qu'il alla loger audit Palais Mazarin, il y a couché cette nuict et y a esté parfaittement bien receu. On croit qu'il yra loger dans son antien logis proche St Eustache, quoy que l'on luy conseille de prendre celuy du feu sieur Loppes, qui est plus proche du Palais Royal. L'on croit que touttes ses [ces] caresses que M. le Cardinal luy fait ce [se] font par maxime, et que la metmorphose de l'Estat n'est pas encor achevée.

M. le Chancellier n'a encor receut aucun ordre de se retirer, mais il n'a pas laissé de demander son congé pour s'en aller aussytost qu'il sera guery. L'on ne sçait où il ira, mais on croit qu'il l'aura [qu'il aura] le choix d'aller en tel de ses maisons qu'il voudra.

Leurs M. doivent partir pour leur voyage de Bourgoigne et vont coucher à Melun, de là Monterault [Montereau], puis à Sens, de là à Auxerre, apres à Noyers, puis à Sainseine [Saint-Seine], et ensuitte à Dijon. Les niepces de M. le Cardinal suivent la Cour.

/178v/ M. le duc d'Orleans, Madame, et Mademoiselle demeurent icy, et M. de Chasteauneuf aussy à cause que le Conseil n'y va pas. On parle de transferer M. le Prince dans la Bastille pendant ce voyage, et de le faire garder par un cappitaine des gardes du corps du roy, comme c'est l'ordre, et non pas par M. de Bar, qui n'est pas officier.

M. le Cardinal a offert à M. le Coadjuteur de luy resigner son abbaye d'Ocan [Ourscamps] en Picardie, laquelle vaut 50 mille livres de rente, mais il l'a refusée et l'en a remertié fort civilement.
On parle de donne la charge de prevost des marchands à M. de Broussel, et enfin l'on remarque que les principaux Frondeurs ont aujourd'huy le plus grand credit à la Cour.

Le restablissement de M. de Chasteauneuf fait esperer celuy des affaires du Roy, et l'on attend des heureux succes de la conduitte d'ung homme qui est estimé tant par sa probité que par son grand genie et par la cognoissance et experience qu'il a aux affaires d'Estat, où il est consommé.

Le 2 du courant la reyne d'Angleterre partit d'icy pour aller à Beauvais, où elle se doit abboucher avec le Roy son filz, lequel y doit arriver aujourd'huy et s'en alla de là à Breda pour y traitter avec les Escossois. Il ne passe point par icy à cause des ceremonies qu'il faudroit faire, lesquelles retarderoint le despart de la Cour.

Le mesme jour on eut nouvelle de Catalougne que le duc de Mercoeur est arrivé à Barcelonne, où il a esté fort bien receu.

Ledit jour on eut advis de Tholouze que le regiment de la Reyne estant arrivé dans la ville de Lisle en Albigeois, s'estoit emparé des clefs et avoit fort maltraitté les habitans jusques en tuer cinq sur la place qui ne leur vouloint pas accorder ce qu'ilz demandoint, ce qui donna lieu au Parlement de Tholouze d'y envoyer un president et un conseiller pour informer de cette action.

Le mesme jour on eut nouvelle de Bourgoigne que le sieur de St Micaud n'avoit point voulu entendre à la proposition qu'on luy avoit faict de la part de M. de Vendosme de luy donner 25 mille escus de recompense s'il vouloit rendre la place au Roy; neamoings on asseure que le baron de Syron traitte à la Cour pour ledit de St Micaud, et qu'il se fait fort de l'obliger à s'accommoder aussytost que le Roy sera arrivé en Bourgoigne. Cepandant celuy cy a 600 fantassins et 400 chevaux dans Seurre, où il croit d'estre hors d'estat d'estre assiegé et à exiger des contributions 5 ou 6 lieues à la ronde, en quoy il est assisté par les /179/ comtes de Tavanes, de Coligny, et autres; lesquelz sont postés au village de Protay sur la frontiere du comté de Bourgoigne avec 800 chevaux qu'ilz ont sans infanterie. Ilz ont voulu entrer dans la Franche Comtée pour tendre les bras à des trouppes qu'on leve dans la souverainetté de Neufchastel [Neuchatel] pour Mme de Longueville, qui y va; mais les Contois, qui veulent observer la neutralité, ne les y ont pas voulu souffrir, les ayant obligés à repasser la riviere et à revenir dans leurs postes. Ceux cy ne veulent pas non plus donner passage aux trouppes qui ce [se] remassent Neufchastel. Ceux du regiment de Persan qui avoint pris le party des princes, l'ont quitté et se sont revenus à Auxone, où ce regiment s'est restably pour y servir soubz M. de Vendosme, lequel est maintenant à Beaune avec pres de 3 mille fantassins et 2000 chevaux, et l'on fait marcher plusieurs autres trouppes qui le vont joindre. Il a choisy des conseillers du Parlement de Dijon pour y estre intendantz de justice.

Du costé de Stenay il y a nouvelle que le mareschal de Turenne y est le maistre, soit qu'il aye surpris le marquis de la Moussaye, ou que celuy cy y aye consenty; et qu'il a traicté avec l'archiduc Leopold, auquel il s'oblige de luy donner cette villa [ville là], et celuy cy luy doit fournir deux mille chevaux et 4000 fantassins, dont on asseure qu'il en est desja arrivé 1500 dans Stenay; et que ce mareschal a receu d'un gentilhomme envoyé par Mme de Longueville qui s'est abbouchée avec l'archiduc Leopold en passant à Bruxelles, des lettres de change pour 1000 mille livres.
Hyer un courrier envoyé par les tresoriers de France de la generalité de Tours arriva icy et porta nouvelles que la pluspart des villes et bourgs de Poictou, Touraine, Angoumois, et Perigord estoint en armes contre ceux qui y levent les tailles; et que si on [n']y envoye des trouppes en diligence, l'on ne devoit esperer d'y lever aucune chose.

M. Hervart n'a encor peu rien faire apres de[s] trouppes allemandes, qui veulent absoluement de l'argent avant que traitter.

Le bruit continue que l'on doit donner à M. de Servient la charge de secretaire d'Estat qu'exerce M. de Brienne, et de bailler celuy cy pour recompense celle de grand maistre de la garderobbe du roy qui apartient à M. de Roquelaure, lequel auroit par ce moyen celle de premier gentilhomme de la chambre qui appartient à M. de Souvray, auquel on donneroit un gouvernement pour recompense; et l'on croit que ce pourroit estre Saumeur, duquel on n'a pas encor disposé non plus que de celuy de Brissac, qu'on pourroit bien estre contraint de donner à M. de /179v/ Charlevoix, qui en est lieutenant et à present maistre de la place. Quant à celuy de Pignerol, il n'est point vacant et il y a nouvelle que M. de Malicy ce [se] porte mieux.

On a desja faict partir quelques compagnies des gardes pour aller en Bourgoigne.

Les depputtés de Provence feurent hyer appellés au Conseil d'en haut, où ilz dirent le suject de leur deputation, qu'il [qui] n'estoit que des plaintes qu'ilz firent contre le comte d'Alais et des demandes qu'on fit de loger les trouppes qui sont en quartier d'hyver en Provence; à quoy il leur feut respondu qu'on avoit choisy M. de Varennes, gentilhomme de la chambre du roy, pour aller sur les lieux et informer de ce qui s'estoit passé despuis la paix, laquelle la Reyne leur promet de faire executter punctuellement. L'on envoye aussy M. de Villemontée à Bourdeaux pour informer de l'inexecution de paix et la faire executter.

Il y a des nouveaux depputtés des Suisses qui sont en chemin pour querir les trouppes suisses, mais on leur a mandé qu'ilz attendissent à Auxerre, où la Reyne leur parleroit et tascheroit de leur donner contentement.

Les lettres de Duncherque portent que les ennemis sont en campagne et vont du costé de la mer à desseing d'y faire quelque entreprise. L'on y envoye d'icy dix compagnies des gardes pour renforcer les garnisons des places maritimes qui sont de ce costé là, et 8 autres compagnies des gardes demeureront pour ce [se] refraischir jusques à nouveau ordre.

/181/ De Paris le xi mars 1650

Le 5 du courant Leurs M. partirent d'icy pour le voyage de Bourgoigne et feurent coucher à Melun, où elles demeurarent toutte la journée du 6, auquel jour M. le Cardinal partit d'icy pour les aller trouver et amena ses niepces accompagné de 60 ou 80 chevaux. L'on remarqua que lors qu'il passoit dans le faubourg St Victor le peuple luy fit quelques huées avec des imprecations, dont neamoings il ne fit pas semblant de se mouvoir. Une heure devant son despart, M. de Boissy, gouverneur du Pont Dormy en Picardie, eut des grosses parolles avec luy sur ce que luy ayant demandé le gouvernement de Salces, celuy cy ayant tousjours faict esperer et mesmes promis 5 ou 6 jours auparavant de luy en faire donner les expeditions devant le despart de la Cour, Boissy se presentant à ce cardinal à son despart, il le voulu payer de parolles son ordinaire, sur quoy il se mit en colere et luy declara qu'il ne seroit jamais son serviteur et ne le verroit jamais, qu'au contraire il alloit offrir ses services à ses ennemis contre luy.

Aussytost apres le despart de Leurs M. un cappitaine du regiment des gardes feut posté devant le palais d'Orleans pour y garder S.A.R. en l'abscence du roy, et 8 compagnies sont demeurées icy pour cest effect suivant le desir de Sadite A., qui a resolu avoir cette marque de grandeur. Mademoiselle est demeurée icy avec Madame.

Le bruit court qu'au retour du voyage de Bourgoigne le Roy doit passer à Rheins pour y estre sacré, et que cela se fera sans aucune ceremonie.

MM. Servien et Le Teillier sont demeurés icy, ce dernier ayant faict suivre la Cour par M. Le Roy, son premier commis, pour faire les expeditions necessaires.

Quelques jours devant le despart du Roy les depputtés de Provence ayant fait leurs plaintes et remonstrances contre le comte d'Alais, ont [on] resolu au Conseil d'en haut de casser 15 compagnies du regiment de ce comte et de les envoyer soubt un autre nom en garnison à Porto Longone; que les consulz de la ville de Marseille seroint faict par le Roy; et que pandant l'absence de Leurs M. touttes les affaires des provinces seroint decidées dans le Conseil par M. le duc d'Orleans, M. de Chasteauneuf, et les autres ministres qui sont demeurés icy. Ces deputtés estant le 4 dans le cabinet de M. de Brienne parlant des violences que le comte d'Alais fait en Provence, un secretaire de ce comte nommé Meunier s'y rencontra et donna un dementy à un conseiller d'Aix qui portoit la parolle pour les autres deputtés, disant que ce qu'ilz avanceoint estoit faux. Sur quoy ce conseiller luy ayant donné un coup de pied, l'autre luy rendit un soufflet, et ilz se seroint gourmés si M. de Brienne ne les eut separés. Ce conseiller en fit aussytost ses plaintes à [la] Reyne et le lendemain au Parlement, où cest affaire fit grand bruit.

M. de Hardivineuil s'est retiré à Blois la semaine passée pour avoir despleut à S.A.R., à laquelle il avoit dit entre autres choses qu'en consentant à l'emprisonnement de /181v/ MM. les princes, qu'elle avoit fait une planche contre elle mesme.

Le 6 M. le Chancellier partit d'icy pour aller à Rosny proche Mantes. Devant son despart la Reyne luy avoit faict dire qu'elle estoit tres satisfaitte de ses services, mais que le bien de l'Estat demandoit dans les conjonctures presentes qu'on bailla les sceaux à un autre. On asseure que la dernier expedition qu'il a sellé est l'abolition du marquis de la Boulaye, qu'il a [qui l'a] obtenu par la faveur de M. de Beaufort. M. de Chasteauneuf est tousjours logé dans le Palais Mazarin en attendant qu'il aye trouvé un logement commode.
On a donné l'admirauté à M. de Vandosme et la survivance à M. de Beaufort, qui cependant prendra 40 mille livres tous les ans sur le droit d'ancrage avec une pension de 20 mille escus sur le domaine du roy. Quelques ungs veulent que les provisions de l'admirauté ne doivent estre mises entre les mains de M. de Vendosme qu'apres que M. de Mercoeur aura espousé la niepce de S.E., et que pour cest effect il doit revenir en diligence de Catalougne pour l'espouser à Dijon ou à Auxerre et s'en retourner aussytost apres.

Mme d'Aigullion obtient il y a quelque temps de M. le Chancellier un privilege au nom d'un nommé Du Sault pour faire imprimer un livre intitulé L'histoire du ministere du cardinal de Richelieu fait par feu M. Vialard, qui estoit evesque d'Avranche; mais l'ayant obtenu, elle trouva que ce livre venoit d'estre imprimé en grand volume in folio par 5 ou 6 imprimeurs associés qui avoient eu la permission de M. le Premier President, dont elle fit grand bruit; et s'en estant plainte à ce dernier à cause que ce livre parle fort contre M. le duc d'Orleans et contre MM. de Vendosme, Chasteauneuf, le president Le Coigneux, Mme de Chevreuse, et autres, il luy fit response qu'elle s'en plaignit au Parlement et qu'on luy feroit justice. Depuis on a fait une exacte recherche ches les imprimeurs pour enlever les exemplaires, et l'on poursuit pour faire brusler ce livre par les mains du bourreau; sur quoy le Premier President soubtient qu'il n'y a point veu touttes ces invectives lors qu'il a donné la permission de le faire imprimer.

Le mesme jour l'evesque de Sarlat preschant dans l'esglise St Gervais de cette ville rapporta un exemple de la Ste Ecriture dont il fit un paralele de M. de Beaufort, sans neamoings le nommer. Il dit qu'Absalon estant jeune et de poil fort blond, assembla la magistrature dans la ville de Hierusalem, qui estoit un autre Paris, et y seduisit le peuple contre le roy David son pere, mais qu'il receut la punition qu'il en avoit merité. Cela feut fort remarqué et cest evesque en est fort blasmé.

M. le Cardinal a fait compliment à son despart à tous les principaux /182/ Frondeurs du Parlement, ausquelz il a fait faire des grandes protestations d'amitié. L'on asseure que S.E. a mandé à M. d'Hocquincourt, gouverneur de Peronne, qu'elle avoit obtenu de la Reyne un baston de mareschal de France pour luy, le priant de n'en dire mot à cause qu'il en avoit encor d'autres qui y pretendoint et la pressoint pour cela; mais on dit à M. d'Hocqincourt qu'elle donnoit la mesme esperance à 3 ou 4 autres.

On a envoyé un courrier au prince Thomas pour luy offrir le commandement de l'armée de Flandres. On a offert aussy au mareschal de la Mothe celuy de l'armée d'Italie.

Un autre courrier a esté envoyé portant ordre de mettre en liberté M. de St Aunais, ce qui a esté fait à la priere du prince Thomas.

Le 7 un courrier envoyé de Bologne [Boulogne] en Picardie par M. de Villequier arriva icy et porta nouvelle que les ennemis estoint en campagne en nombre de 10 à 11 mille hommes et s'aprochoint de la frontiere. C'est pourquoy il demandoit du secours afin de faire un corps d'armée considerable pour s'opposer à leurs desseings; mais despuis on a eut nouvelle qu'ilz s'estoient retirés et que le froid les avoit obligés de se remettre en garnison dans les places.

Le 8 M. de Tilladet receut les prouvisions du gouvernement de Brissac, et l'on asseure que M. de Cominges est allé prendre possession de celuy de Saumur.

Le 9 on eut advis de Bourdeaux que la citadelle de Libourne feut entierement desmolie le 27 du passé par les habitans du lieu, qui y firent travailler leurs femmes et leurs enfans nuict et jour au son des violons; et que l'exempt des gardes qu'on a envoyé à Bourdeaux pour garder ce qui reste du Chasteau Trompette, en a pris possession en presence de deux juratz, mais que n'ayant peu trouver de logement il avoit esté obligé de loger dans la ville, en attendant qu'il en eut faict faire un. Les depputtés du Parlement et de la Ville de Bourdeaux arriverent icy hyer au soir au nombre de 4 et apporterent les informations qu'ilz ont faittes contre M. d'Espernon touchant l'inexecution de leur paix.

De Dijon l'on mande que St Micaud, qui command dans Seurre, avoit refusé derechef un autre proposition que M. de Vendosme luy av[o]it fait faire de luy donner 100 mille livres à condition qu'il remettra la place entre les mains du Roy, mais on asseure qu'il n'en est pas le maistre et qui [qu'il] ne la peut rendre que par le consentement du comte de Tavanes et des autres amis de MM. les princes qui sont postés aux environs, lesquelz continuent d'exiger des contributions 5 ou 6 lieues à la ronde et font des courses jusques aux portes de Dijon; et le premier du courant ilz bruslarent 5 ou 6 villages, quoy que /182v)/ M. de Vendosme feut à Dijon, où il donna le bal aux dames le soir du mesme jour.

Du costé de Stenay l'on mande que le general Rose arriva aux environs de Clermont avec 1000 ou 1200 hommes et quelque artillerie le 3 du courant; que le mareschal de Turenne ayant apris qu'il s'en aprochoit, s'avancea avec 2 à 3000 chevaux en desseing d'attaquer ce general, lequel en estant adverty et ne se voyant pas asses fort pour luy faire teste, se retira vers Ste Menehoud; et que ce mareschal avoit laissé son infanterie au poste de Sivey [Sivry] sur la Meuse. L'on confierme qu'il a traitté avec les Espagnolz et qu'il en attendoit encor des trouppes et 40 mille escus par mois qui [qu'ils] luy ont promis.

Les avis d'Holande portent que Mme de Longueville est arrivée à Roterdan [Rotterdam]; qu'elle avoit envoyé un gentilhomme à Bruxelles pour sçavoir de quelle façon on l'y recevroit, ayant fait desseing d'y aller; et que les Espagnolz avoint proposé aux Holandois que s'ilz leur vouloint prester 20 millions, ilz leur mettroint entre les mains les citadelles de Gand et d'Anvers pour seureté de leur rendre cette somme au temps qu'ilz leur promettroint, dont cepandant ilz leur payeroint l'interest.
Les ambassadeurs des Suysses arriverent icy le 8 pour demander le payement des Suisses qui servent dans les armées du roy, ou autrement les faire retirer. Ilz n'ont pas voulu demeurer à Auxerre, comme ilz avoint esté priés, à cause que M. le duc d'Orleans, à qui ilz ont ordre de s'adresser, n'a pas suivy la Cour. Ilz n'ont pas encor veu S.A.R. parce qu'elle s'en alla avant hyer à la chasse en sa maison [de] Limours, dont elle n'est revenue qu'aujourd'huy; cepandant on travaille fort a leur donner contentement. On leur avoit offert quelques assignations qu'ilz n'ont pas trouvé bonnes et les ont refusées. On leur en cherche des melieurs.

Le regiment de Paluau qui estoit en quartier d'hyver en Lymosin ayant eu ordre d'aller en Bourgogne pour y joindre les autres trouppes qui y sont, le partisan Tabouret, qui a fait des avances sur les tailles, a obtenu que ce regiment y demeureroit jusques à ce que les tailles de cette province là seroint levées; et pour cest effet il leur a donné une demy monstre tirée de sa bourse propre.

Il y a nouvelle de Provence que le comte d'Alais a desja faict embarquer à Tholon les 15 compagnies qu'on a tirées de son regiment pour envoyer à Portolongone.

On parle fort d'establir une chambre de justice pour faire le proces aux /183/ partisans, et on asseure que M. de Chasteauneuf y est fort porté. Quelq'ungs mesmes veulent que ce soit une chose resolue. Celuy cy s'est fait apporter touttes les augmentations que M. le Chancelier a fait sur les droits du sceau, lesquelz il veut suprimer.

Leurs M. partirent hyer de Sens, apres y avoir esté fort magnifiquement receus et traittées par l'Archevesque du lieu et feurent coucher à St Jullien du Sault, d'où elles vont aujourd'huy à Auxerre. C'est là où elles resoudront si elles doivent passer plus avant ou revenir.

Il y a advis certain que les Espagnolz ont envoyé 18 regimentz au mareschal de Thurenne, lequel a maintenant 3000 chevaux et 1000 fantassins.

M. du Tilladet est sur son despart pour aller prendre possession du gouvernement de Brissac, mais on doubte qu'il y soit receu parce que M. de Charlevoix, qui en est lieutenant et qui en est le maistre, a fait amitié avec le neveu d'Erlach, qui est aussy dans la place et en pretend le gouvernement.
Mme la duchesse de Nemours accoucha hyer au matin d'ung filz.

/184/ De Paris le 18 mars 1650

Le duc de Joyeuse arriva icy la semaine passée venant de Provence, où il a laissé sa femme grosse.
La grossesse de Mme d'Orleans continue. Les petites princesses ses filles sont malades de la petite verolle.

Le balet de M. de Mombrun feut dereschef dansé le xi du courant au palais d'Orleans où il y eut grande compagnie.

Le mesme jour le comte de Brancas feut ches M. d'Hemery, où estant entré malgré les Suisses qui estoit à la porte, le feut quereller dans sa chambre sur ce qu'il avoit rayé 40 mille livres de pension qui estoint assignés à M. l'abbé de la Riviere sur les Estatz de Languedoch, ce comte estant grand amy de celuy cy et ayant mesme interest avec M. d'Oradoux et quelques autres sur une autre pension que ledit sieur d'Hemery a rayé, dont celuy ci se plaint hautement.

Le mesme jour l'evesque du Puy fit une harangue à M. le duc d'Orleans par laquelle ilz se plaignit des grandz desordres et sacrileges que le regiment de Languedoch a commis en ce pays là; sur quoy M. de Valony, maistre de camp de ce regiment, dit à cest evesque, apres que S.A.R. ce [se] feut retirée, que c'estoint des impostures et que, n'eut esté le respect de son caractere, il se seroit esgorgé avec luy: à quoy celuy cy repartit qu'il estoit gentilhomme mais qu'il estoit marry que sa profession l'empeschat de luy faire raison, et que tout ce qu'il pouvoit faire en cette occasion estoit de prier Dieu qu'il le voulu amander. S.A.R. ordonna qu'on informeroit des exces que ce regiment avoit commis, dont les chefz seroint responsables.

Ledit jour S.A.R. et M. de Chasteauneuf ce [se] trouverent au Conseil des finances qui ce [se] tient ches M. d'Hemery, où elle feut encor hyer; mais avant hyer ce feut au palais d'Orleans que le Conseil ce [se] tient à cause que c'estoit pour des affaires d'Estat.

M. d'Hemery est tousjours malade, et l'on ne croit pas qu'il puisse vivre longtemps. Le[s] Frondeurs le persecuttent soubz main, et l'on croit qu'il ne sera pas longtemps dans les finances, ausquelles M. Tuboeuf, qui a suivy la Cour, a grand part, quoy que le marquis de la Vieuville a grand soing de faire sa cour aupres M. le duc d'Orleans et M. de Chasteaunef pour les avoir, et que le mareschal de l'Hospital et le president de Maisons y pretendent. On asseure que Mme de Chevreuse a receu ces jours passés 100 mille livres des coffres de l'Espargne et qu'elle a fort tourmenté M. d'Hemery pour les avoir. Elle a encor des assignations pour pareille somme, des 200 mille livres luy estant ordonnés par la Reyne avant son despart pour l'indemniser des pertes qu'elle pretend avoir faittes dans son exil.

/184v/ Les deputtés des Suisses n'on pas eu encor audience de M. le duc d'Orleans, lequel les avoit prié auparavant d'aller trouver la Reyne, leur promettant cepandant de faire tous les efforts pour leur faire obtenir la satisfaction qu'ilz demandent; mais lors qu'ilz se disposoint pour aller trouver Leurs M. à Dijon, S.A.R. leur a faict dire qu'ilz ne partissent pas encor parce qu'elle attendoit des ordres de la Reyne pour traitter icy avec eux.

Les deputtés de Bourdeaux ont receu cette semaine des lettres de leur parlement pour rendre à la Reyne, à M. de duc d'Orleans, et à M. le Cardinal, par lesquelles ilz continuent leurs plainctes contre M. le duc d'Espernon et demandent un autre gouverneur. Ilz doivent bientost aller à la Cour pour cela, et parlent de presenter requeste au Parlement pour demander qu'on fasce le proces à ce duc sur les informations qu'ilz ont raportées, en cas qu'on leur refuse de le changer.

Un courrier arriva icy avanhyer venant de Lymosin et rapporta que quelque noblesse de ce pays là ayant assisté les paysans à s'y revolter, ilz s'estoint assemblés du nombre d'environ 2000 soubz pretexte de faire observer la declaration du mois d'octobre 1648, en ce qu'il est porté que les tailles ne seront pas levées à main armée; sur quoy M. Foulé, intendant des finances, fit ramasser les regimentz de cavalerie de Paluau et de Meilleraye et quelques autres trouppes d'infanterie qui sont en quartier d'hyvert, lesquelz defirent ses [ces] paysans ramassés, en tuerent 6 à 700, en firent plusieurs prisonniers apres un combat fort longtemps opiniastre, tous les autres s'estant dissippés.

Mme d'Aigullion ayant negotié l'accommodement du duc de Bouillon aupres de Mme de Duchesse, sa femme, laquelle est tousjours icy gardée, Leurs M. et M. le Cardinal luy ont escript, et Madame sa femme aussy, qui [qu'il] s'en vient à Paris en toutte seureté, celle cy luy ayant adjousté que l'intention de la Reyne estoit de luy confisquer tout son bien s'il n'obeissoit. Ces lettres luy ont esté envoyées par un sien gentilhomme il y a 4 ou 5 jours dans la vicomtée de Thurenne [Turenne], où il est encor, et l'on tient pour asseuré qu'il viendra.

M. le mareschal de Schomberg s'estant entremis pour l'accommodement du prince de Marcillac, qu'on nomme à present le duc de la Rochefoucaud depuis la mort de son pere, a obtenu qu'il ne seroit point recherché pour le passé et que son gouvernement de Poictou, où il est present, luy seroit conservé à condition qu'il viendroit icy pour se retirer à la Roche Guion, où ce mareschal a eu parolle de la Reyne qu'il seroit en toutte seureté.

Le comte de Quincé alla la semaine passée en Normandie pour y prendre possession du gouvernement de Caen, qu'on luy a donné, lequel on estime 25 mille livres de rente. L'on ne sçait à qui sera donné celuy du Catelet, qui apartient à ce comte. L'on dit qu'il a esté promis au sieur de Roncherolles, cappitaine aux gardes.

/185/ M. de Tilladet n'est pas encor party pour aller prendre possession de son gouvernement de Brissac. L'on ne sçait pas le suject de ce retardement.

L'on escript d'Anvers que le 6 du courant le chevalier de Granmont, qui avoit suivy Mme de Longueville, s'y estoit abouché le jour precedent avec le comte de Fuelsendaigne et en estoit party le lendemain pour aller trouver à Bruxelles l'Archiduc.

Les nouvelles qu'on a eu de Champagne cette semaine sont fort diverses. Il y a des lettres qui portent que le mareschal de Thurenne ayant receu 18 regimentz, la pluspart Lorraines qui luy ont esté amenés par le duc de Vittemberg et par le marquis Sfrondatti, se trouva fort de 3000 chevaux effectifs et 2000 fantassins. D'autres portent que ces 18 regimentz lorrains sont encor dans le Luxembourg, n'ayant pas voulu joindre ce mareschal jusques à ce qu'il puisse livrer aux Espagnolz la place de Stenay, dont la citadelle est tousjours entre les mains de M. de Chamilly, qui en est le maistre et ne permet point que ce mareschal y entre que luy 2e. D'autres asseurent qu'il a livré au marquis Sfrondatti une porte de Stenay seulement et qu'il doit livrer toutte la place lors qui [qu'ils] luy auront remis entre les mains celle de Montmedi, qu'ilz luy donne pour seurté de leur part. Ce qu'il y a de plus certain est que ce mareschal est posté avec la cavalerie seule au bourg de Bezancy [Buzancy], proche Grandpré, où il retourna apres avoir manqué la surprise qu'il vouloit faire des trouppes du lieutenant general Rose; lequel en ayant esté adverty 3 heures devant par une gentilhomme qui avoit esté à M. de Marolles, gouverneur de Thionville, qui pour cest effect quitta M. de Turenne la nuict, eut le loisir d'assembler tous ses quartiers, de renger ses gens en batailles, et de dresser les batteries du canon qu'il avoit amené; de sorte que ce mareschal le trouvant dans cette disposition ne l'attaqua point. Le general Rose est posté au bourg de Bussy proche Ste Menehoud avec 800 chevaux et 400 fantassins. M. de Marolles est avec luy. M. de la Ferté Senetterre est à 3 lieues de là avec pareil nombre de trouppes, et ilz ne ce [se] sont pas joint ensemble cause qu'ilz ne se peuvent pas accorder pour le commandement. Quelques avis de Sedan portent que Mme de Longueville estoit attendue à Montmedy, où elle devoit aboucher à M. de Turenne. M. Hervart est encor dans Nancy, où il attend des nouvelles de la Cour sur les demandes que font les trouppes d'Erlach qui sont en Lorraine.

Du costé de la Bourgogne l'on a eu nouvelles que le Roy estoit party d'Auxerre le 14 et qu'il devoit arriver à Dijon le 16. De Chalons sur Saone l'on mande que les troupes du comte de Thavanes et autres amis de M. le Prince continuent leurs courses, pilleries, et incendies dans la Bourgogne en deça de Seurre, mais que le duc de Vendosme fait assembler son armée aux environs de la ville de Beaune, où il y avoit desja 2 mille chevaux et 8000 fantassins qui avoint receu ordre de s'avancer vers Seurre, /185v/ soit pour la bloquer en deça ou pour y bastir quelques fortz pour empescher le passage de la Saosne aux troupes du comte de Tavanes et de rendre par ce moyen la place inutile jusques à ce que le temps soit propre et qu'on aye asses de trouppes pour l'assiger. Cepandant les troupes de ce comte commencent à se desbander, ayant grand peyne de subsister de delà, et les Francomtois faisoint esperer qu'ilz ne leur donneroint aucune subsistance afin de ne rompre pas la neutralité, quoy que quelq'ungs veulent que le mareschal de Turenne aye arresté avec l'Archiduc par son traitté qu'on les obligeroit à la rompre et à donner passage aux trouppes qui se levent au nom de Mme de Longueville en sa souverainetté de Neuf Chastel. M de Vendosme convoque une asemblée particuliere des Estatz de la province en la ville de Beaune pour desliberer sur les moyens de faire subsister les trouppes du Roy, et l'assemblée generale des Estatz à Bourg, mais parce qu'il est malade de fievre continue à Dijon, touttefois sans danger, il n'a peut ce [se] trouver ny en l'une ny en l'autre. Il a envoyé à la soeur de St Micaud à Seurre pour persuader à son frere d'obeir du Roy en luy faisant des offres plus avantageuses que les precedentes, d'où l'on infere que ledit St Micaud est maistre de la place et non le comte de Tavanes, comme il avoit esté dit. La garnison de St Jehan de Laune fit une sortie la nuict du xi au 12 dans laquelle elle surprit un quartier de ceux du comte de Tavanes, dont il en tua 10 ou 12, en fit autant de prisonniers. Mademoiselle est faschée contre M. de Vendosme à cause qu'il a envoyé des trouppes loger dans touttes les terres qu'elle a dans la Bourgogne et jusques dans la souverainetté de Dombes, où il n'y en avoit jamais eu, dont quelq'uns ont creu que cela s'estoit faict expres parce que Mademoiselle n'a pas voulu suivre la Cour en ce voyage.

M. le Prince a fait faire une volliere d'oiseaux dans sa chambre pour se divertir. M. le prince de Conty est malade, à cause de quoy on ne bat plus le tambour autour du Bois de Vincennes. M. de Longueville est tousjours seul dans sa chambre. Ilz baillent tous trois 100 mille livres pour leur nourriture, ce qui leur a esté donné n'estant pas sufisant pour cela. M. Foquet, controlleur de la maison du roy, qui est chargé de la despense qu'ilz font, feut veoir M. Le Teillier ces jours passés pour luy representer que cela estoit bien honteux qu'il n'y eut pas de quoy les nourrir et qu'ilz feussent obligés eux mesmes de se nourrir en prison; à quoy M. le Teillier repartit seulement qu'il estoit bien honteux que le Roy n'eut point d'argent.

Le mareschal de Granmont partit hyer d'icy pour s'en aller à [la] Cour. Le duc de Richelieu partit aussy pour y aller avec Madame sa femme. Mme d'Aigullion /186/ est tousjours dans la resolution de faire casser ce mariage; et l'on asseure que comme il n'y a point de difficulté, elle a arresté avec Mme de Chevreuse de le marier avec sa fille. L'abbé de Richelieu est demeuré icy et s'est accomodé avec sa tante, laquelle luy a donné 10 mille escus pour son entretien, à condition qu'il continue ses estudes.

La resolution ayant esté prise au Conseil avant le despart de Leurs M. que les consulz de la ville de Marseille seroint faitz par le Roy, M. d'Angoulesme a fait changer cette resolution apres leur despart dans le Conseil, qui est demeuré icy, et en mesme temps a envoyé un courrier à Marseille pour faire l'eslection des consulz en la maniere accoustumée, ce qui n'a pas esté receu de tous avec satisfaction; neamoings on croit que la brigue du comte d'Alais y sera plus forte et qu'il fera eslire des personnes à sa devotion. L'on mande d'Aix que le sieur Vitalit, avocat general de la Chambre des comptes, y a esté tué en pleine rue d'ung coup de mousquet.

On envoye MM. de Here et Fouquet, maistres des requestes, intendantz de la justice en Bourgogne, et le partisan Catalan ira avec eux.

Le marquis de Nerly, ambassadeur de Mantoue, prit hyer congé de M. le duc d'Orleans et de Mademoiselle pour s'en retourner. Il avoit prit congé de Leurs M. avant leur despart.

M. le comte d'Harcourt est allé en Basse Normandie afin de se faire recevoir de toutte la France.

Le chevalier de Bourlemont ayant prit 2 vaisseaux chargés de marchandises à la veue du port de Livourne, les Armeniens à qui elles apartenoint vindrent icy et arriverent devant le despart de la Cour pour les reclamer. Cette affaire ayant esté mis en deliberation au Conseil, on leur donna une lettre de cachet portant ordre à ce chevalier de leur restituer leurs marchandises et une ordonnance de mille escus pour les frais qu'ilz ont fait de venir icy. Sur cela ilz envoyerent 7 ou 8 des leurs aux isles Ste Marguerite, où leurs vaisseaux avoint esté menés pour veoir si on executeroit le contenu de la lettre de cachet, et les autres demeurerent icy au nombre de 15, où ilz poursuivent le payement de l'ordonnance de mille escus qui leur a esté donné à prendre sur M. de Loynes, secretaire de la marine, duquel ilz n'ont peut rien tirer; mais M. le duc d'Orleans leur promet de les faire payer. Le chevalier de Bourlemont ayant sceu qu'il y avoit ordre de restituer les marchandises, accourut en poste et soubtien qu'il avoit l'estandart d'Angleterre lors qu'il les prit, mais les Armeniens font veoir une attestation par laquelle ilz font veoir qu'il n'avoit que l'estandart de France. Ces marchandises sont la pluspart soye, fourreures d'hermine, tapis d'or et de soye, /186v/ estimées 800 mille livres pour ce qui apartient aux Armeniens, mais il y en a encor d'autres estimées 700 mille livres dans les mesmes vaisseaux, lesquelles apartiennent à des marchandz anglois et n'ont point encor esté reclamées. La republique de Genes ayant sceu cette prise, deffendit à touttes personnes sur peyne de la vie d'achepter aucune de ses [ces] marchandises, nonobstant quoy un marchand genois ayant esté aux isles Ste Marguerite en traitta avec ce chevalier et luy en bailla 7000 pieces de 58 sols de reeses [de réis?], qu'il a peyne de retirer, n'osant pas les reclamer à cause de la deffence de la Republique.

Le bruit continue que Leurs M. doivent aller de Dijon à Lyon, où elles demeureront quelque temps; et que le duc de Mercoeur doit revenir de Catalougne pour y espouser la niepce de M. le Cardinal. On dit que le vray subject de ce voyage et pour une entrevu qui se doit faire du Roy avec la princesse de Savoye, laquelle y doit venir ayant esté projetté de faire le mariage de Sa M. avec elle quand ilz auront asses d'aage pour cela; mais on adjouste que c'est pour entretenir le duc de Savoye dans cette esperance et l'empescher de se lier avec l'Espagne, comme le bruit le court que c'est son desseing; et qu'à cette fin le roy d'Espagne luy promet l'Infante en mariage, ce qu'on aprehende à la Cour.

/188/ De Paris le 25 mars 1650

Vous aves sceu le bruit qui a couru asses longtemps despuis la detention de MM. les princes qu'on vouloit oster au duc de [la] Rochefoucaut le gouvernement de Poictou, sans qu'il se parlat de l'en recompenser. M. le prince de Tarante pretend à ce gouvernement, et l'on remarque qu'il n'a pas tesmoigné d'y penser jusques à ce qu'il a sceu que ce duc en avoit offert à la Reyne la demission volontaire pourveu que Sa M. l'en voulut indemniser; ensuitte de laquelle offre ce prince a declaré hautement qu'apres les belles parolles qui ont esté données de la part de la Reyne et de M. le Cardinal, tant à luy qu'à M. de la Tremouille, il auroit grand subject de ce [se] plaindre si on disposoit de ce gouvernement en faveur de quelque autre que de luy ou de Monsieur son pere.

Le 19 du courant on eut advis d'Arras que M. de Villequier y attendoit le roy d'Angleterre, qui passe par la Flandres pour aller à Breda; et qu'il avoit faict publier deffenses à touttes personnes sur peyne de la vie de prendre qualité de volontaire à la suite des armées, afin d'empescher les voleries qui se commettent ordinairement par des gens sans adveu qui suivent les regimentz soubz le nom de volontaires.

Le 20 au matin l'abbé Mondin, Piedmontois, mourut en cette ville n'ayant voulu dire à personne, jusques à ce qu'il feut à l'article de la mort, l'endroit où il avoit mis les pierreries de M. de Cardinal qu'il en avoit en garde, lesquelles S.E. auroit couru grand risque de perdre si l'abbé Bentivole ne l'eut pressé de declarer ce secret, qu'il ne vouloit confier à personne. On dit qu'il en avoit pour 800 mille escus. Son canonicat de Nostre Dame a esté donné à M. de Ventadour. Le lendemain le curé de St Eustache ayant sceu que les chanoines de Nostre Dame vouloint enterrer ce corps dans leur esglise à cause qu'il en estoit chanoine, le fit enlever et apporter dans St Eustache, où il est encor dans une chapelle et y sera jusques ce que le proces soit vuidé au Parlement.

Le mesme jour le courier que M. le duc d'Orleans attendoit touchant l'affaire des Suisses arriva icy et apporta à S.A.R. le pouvoir de traitter avec leurs depputtés qui sont icy, lesquelz eurent avant hyer audience de Sadite A., qui les receut fort bien et leur fit esperer une prompte satisfaction. On leur promet 3 ou 400 mille livres d'argent comptant et le reste en assignations; cepandant l'on a remarqué qu'ilz n'ont point rendu de visitte au mareschal de Schomberg, duquel ilz sont mal satisfaictz à cause qu'il ne leur a pas tenu la parolle qu'il leur avoit donné cy devant touchant leurs payement; mais il est à considerer qu'il n'a pas peu la leur tenir parce que M. le Cardinal, qui l'avoit obligé de les leur donner, ne luy en a point tenu à luy.

Outre la lettre de Dijon du 18, il en est venu despuis du 21 qui portent que M. de la Tivoliere, lieutenant des gardes de la reyne, estoit revenu de Bellegarde, où ayant faict là /188v/ sa sommation de la part du Roy pour rendre la place, on luy avoit respondu pour la 3e fois qu'on estoit resolu de la garder pour M. le Prince, les comtes de Tavanes, de Meil, de Coligny, et de Chastelus, le baron de Lanque, et St Micaud, qui commandent chacung à son jour suivant les resolutions qui se prennent entre eux dans le Conseil.

Le 21 M. de Bezançon arriva icy venant d'aupres de Stenay et rapporte que le mareschal de Thurenne ayant voulu faire entrer dans cette place 600 Espagnolz pour garder l'une des portes, le marquis de la Moussaye ne l'avoit point voulu souffrir et luy avoit declaré hautement qu'il vouloit perir pour le service de M. le Prince et qu'il estoit obligé de la garder, mais qu'il ne seroit jamais asses lasche pour la mettre entre les mains des Espagnolz. Le sieur de Chamilly est tousjours le maistre de la citadelle. Ce mareschal n'a pas plus de 5 ou 600 hommes qui soint à luy, touttes les trouppes qui le suivent au nombre de 4 mille estantz ou Espagnolz ou Allemans; avec lesquelz on a sceu despuis qu'il s'estoit allé camper au bourg de Douzi, dont il s'est emparé, ce qui donne grande jalousie à la place de Sedan, qui n'en est qu'à deux lieues et qui la peut facilement incommoder, à cause que c'est un poste fort advantageux et facile à fortiffier. Il avoit apris quelques jours auparavant qu'il y avoit division dans la place de Danvilliers à cause que le sieur de Becherelles n'avoit pas encor receu les prouvisions du gouvernement de cette place, que le sieur Talon refusoit de luy mettre entre les mains; ce qui avoit obligé ce mareschal de s'en aprocher avec 2500 hommes pour tascher d'y fomenter cette division et de surprendre la place; mais ayant apris ensuitte que Becherelles estoit satisfait et que Talon luy voit rendu ses prouvisions, il feut obligé de se retirer. Le duc de Lorraine a deffendu à touttes ses trouppes qui sont dans son obeissance d'assister directement ou indirectement M. de Turenne, lequel cepandant exige des contributions dans tous les villages d'alentour.

Le marquis de la Ferté Seneterre est avec 2 mille hommes au bourg de Grandpré, et le lieutenant general Rose aupres de St Menhoud, où l'on asseure qu'il a receu ordre de passer en Bourgoigne, ne pouvant s'accommoder avec ce marquis.

Le mesme jour on eut nouvelle de Bourdeaux que les juratz ayant esté faitz dans la ville de Libourne en vertu d'une ordonnance du duc d'Espernon, qui par ce moyen avoit fait eslire des personnes à sa devotion, les habitans s'en plaignerent au Parlement et demanderent que cette eslection feut faitte conformement à leurs privileges et à l'antienne coustume; sur quoy le Parlement envoya des commissaires sur les lieux pour en informer comme d'une contravention à la declaration de la paix; et les informations ayant esté apportées audit Parlement, il ordonna que sans s'arrester à l'ordonn[ance] du duc d'Espernon, laquelle feut cassée, l'on procederoit de nouveau à l'eslection /189/ des juratz suivant l'antienne coustume, lesquelz feurent faitz conformement à cest arrest. Ce duc en ayant fait de mesmes dans la ville d'Agen l'esgard des consulz, il y eut encor plainte au Parlement, lequel donna arrest portant cassation de l'ordonnance de ce duc et enjoint aux habitans de s'assembler pour eslire des consulz suivant les antiens statutz; mais y ayant envoyé un huissier pour faire executter cest arrest, ce duc en eut advis et luy envoya au devant quelques hommes masqués, qui le maltraitterent extraordinairement à coup de sachet de sable à 4 ou 5 lieues en deça; sur quoy le Parlement depputta 2 conseillers pour en aller informer sur les lieux pour faire executter l'arrest.

Le 22 au matin Mme d'Aigullion fit arrester prisonnier le sieur Des Maretz, secretaire du duc de Richelieu, dans la maison où ce duc estoit logé avant son despart pour Dijon. Ce feut un exempt du grand prevost qui l'arresta, accompagné de 30 archiers qui le conduiserent au Grand Chastelet, où il est dans une basse fossé; et comme c'estoit luy qui avoit negotié le mariage du Duc avec Mme de Pont, Mme d'Aigullion a commencé par là ses poursuittes pour le faire declarer nul.

Le 23 M. le duc d'Orleans donna ordre aux 8 compagnies des gardes qui estoint demeurées icy pour le garder, de partir le lendemain, comme elles firent, pour aller à St Quentin et en quelques autres places frontieres de Picardie qui ne ce [se] trouvent pas assez bien garnies, S.A.R. aymant mieux se priver d'estre gardée que laisser ces places depourveues.

Le mesme jour à 10 heures du soir Mme de Bouillon et Mademoiselle sa fille sortirent de leur chambre par un escalier desrobé, soit que la garde qui estoit à la porte de la chambre feut corrompu ou endormy, et descendirent dans la cave du logis, où elles sortirent par un souspirail avec une femme de chambre et le controlleur de la maison, qui les attendoit avec un carrosse qui s'en alla à toutte bride; en sorte que M. de Carnavalet, lieutenant des gardes du corps du roy, qui estoit dans l'antichambre avec 12 gardes, ne s'en aperceut q'une heure apres. Cette nouvelle ayant esté apportée hier au matin à M. le duc d'Orleans par M. Le Teillier et par MM. de Beaufort et Coadjuteur, S.A.R. manda M. de Carnavalet pour rendre compte de cet affaire dans le Conseil, qui ce [se] tient au palais d'Orleans, où M. de Chasteauneuf ce [se] trouva; et ledit sieur de Carnavalet y estant arrivé et en ayant rendu conte, feut arresté à la sortie par M. de St Remy, lieutenant des gardes du corps de Sadite A., qui le conduisit dans la Bastille.

L'on envoya hier un courrier à M. le duc d'Anville, qui est en son gouvernement de Lymosin, avec ordre de mettre promptement du monde en campagne sur tous les passages de cette province là, pour chercher Mme de Bouillon et l'arrester lors qu'elle passeroit pour aller trouver le Duc son mary à Turenne. Il y a encor dans cest province là quantité de /189v/ gens en armes pour empescher qu'on y leve la taille à main armée, et M. Foulé ne bouge de la ville de Thulle, où il est gardé par 4 regimentz. Le duc de Bouillon a presenté requeste au Parlement de Bourdeaux par laquelle, apres avoir exposé les raisons qu'il a pour ne pas obeir à la declaration du Roy par laquelle il y est enjoinct de venir à la suitte de la Cour, il demande d'en estre deschargé par arrest.

Le sieur du Mont, lieutenant du feu mareschal de Brezé au gouvernement de Saumur, n'a point encor voulu rendre le chasteau, pretendant une recompense de 24 mille livres auparavant.

Le marquis de Jersey ayant voulu faire prendre les armes à quelque noblesse dans le pays du Mayne et dans l'Anjou, le mareschal de la Mesleraye en a donne advis à la Cour; ce que ce marquis ayant sceu, a envoyé sa femme à la Cour pour s'en justiffier.

On escript de Marseille du 16 que le bruit y estant venu que le comte d'Alais y devoit faire eslire des consulz à sa devotion, les marchandz y fermerent leurs boutiques l'apresdisnée du 14 et tout les monde y prit les armes, demandant des consulz; ce qui obligea l'evesque du lieu de sortir avec une partie de son clergé pour tascher d'apaiser le rumeur, promettant de faire donner contentement à un chacung. Pour cest effect il alla aussytost à l'Hostel de Ville, où feurent mandés que tous ceux qui ont voix en l'eslection des consulz, et ceux cy, donneront en mesme temps au nouveaux le chaperon qui est la marque du consulat, apres quoy ils feurent gardés et le sont encor par les bourgeois, qui ont resolus de ne point quitter les armes jusques à ce qu'ilz auront receu la confirmation de cette nouvelle eslection, laquelle M. de Montholieu, leur depputté, est venu solliciter en Cour.

Les Six Corps des marchands de Paris feurent hier au palais d'Orleans et firent des plaintes à S.A.R. de ce que le prince d'Harcour avoit arresté à Montreuil quelques charrettes de drap et autres marchandises venant d'Holande qui leur apartiennent. S. A. R., apres les avoir fort caressés, leur fit obtenir un arrest du Conseil par lequel il est enjoint au prince d'Harcour de leur rendre leurs marchandises.

M. le Cardinal escrit de Dijon du 22 qu'il s'en va à St Jehan de Laune pour donner chaleur au blocus de Bellegarde et qu'ensuitte il doit revenir.

Le bruit a fort couru que Leurs M. estoint en resolution de faire le voyage de Lyon, mais on croit que ce desseing en est changé, et les lettres de Dijon n'en parlent point.

M. le Prince a demandé les portraitz de Mesdames sa mere, sa femme, et sa soeur. Il s'estoit aussy fait apporter quantité de cartes geographique et plans de villes, mais les crocheteurs qui les portoint, estant arrestés à la porte du chasteau de Vincennes, /190/ feurent fort mal traittés par les soldats de la garnison, qui pillerent touttes ces cartes. M. de Servient y feut avant hyer mais on ne sçait à quel desseing. Le president de Nesmond ce [se] plaint fort de ce que M. de Vendosme a pris 50 mille escus dans la recepte de Bourgongne qui apartenoint à M. le Prince, provenans de quelques assignations qui luy avoint esté données en Bourgonge.

Les depputtés de Bourdeaux partent demain pour aller en Cour porter leurs plaintes contre M. d'Espernon.

M. l'abbé de la Riviere receut hyer ordre en sa maison de Petit Bourg de se retirer en son abbaye de St Benoit sur Loire.

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