Panat in postcardThe Ranums'

Panat Times

Volume 1, redone Dec. 2014

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/34/ De Paris du premier mars 1652

Le 24 du passé le Parlement s'estant assemblé, M. le duc d'Orleans s'y trouva. Le president Le Bailleul y proposa de desliberer sur les conclusions que MM. les Gens du roy avoint donnés sur une lettre de cachet qui ordonnoit de s'opposer à l'entrée des Espagnolz; sur quoy S.A.R. respondit qu'elle avoit desja asses souvent dit, et le repetoit encor, que les troupes du duc de Nemours n'estoint pas les Espagnolz, ce s'estoint [c'estoint] des troupes auxilliaires, et qu'elle avoit jugé à propos de les faire venir pour chasser le cardinal Mazarin; à quoy d'autres vouleurent insister pour faire desliberer. S.A.R. les interrompit et leur dit qu'elle ne vouloit pas empescher le Parlement de prendre les resolutions qu'il jugeroit à propos, mais que quand mesmes il la voudroit abandonner, elle ne l'abandonneroit pas; ce qui obligea la Compagnie à l'en remertier, et à dire qu'il ne falloit plus parler d'y desliberer. L'on parla ensuitte des rentes, mais la desliberation feut remise au 26.

Le marquis de Richelieu estant venu icy, il y a 20 jours, avoit disposé Mme d'Aigullion, sa tante, de luy bailler de l'argent pour achepter la charge de premier escuyer du Roy; mais le cardinal Mazarin, qui la veut avoir pour son nepveu, a fait refuser à M. de Beringhan la permission d'en traitter; et pendant le voyage de ce marquis, le petit Mancini a prit son temps pour faire diminuer le faveur qu'il a aupres du Roy.

Les troupes du cardinal Mazarin qui avoint esté envoyées en Xaintonge soubz le commandement du comte Broglio, ayant fait des grandz desordres en Poictou, où elles ont pillé touttes les maisons des gentilhommes où elles ont passé et bruslé quelques unes, entre autres une partie de celles de M. des Ouches, et fait des grandz desordres dans touttes les parroisses du duché de Thouars [Thouars], sans espargner que les terres de M. de Longueville, la noblesse de la province s'est assemblée par deputtés à Poictiers, pour aviser aux moyens de conserver leurs maisons et terres contre les violences des gens de guerre, et y ont demandé pour cest effect l'union du presidial et de tous les siege royaux de Poictou, laquelle leur a esté accordée d'abord; et ilz ont envoyé 4 deputtés en Cour pour faire leurs plaintes, et remonstrer la necessitté qui les avoit obligé à prendre cette resolution, dont S.A.R. eut nouvelles du 25 par une lettre de M. le duc de la Trimouille.

Les lettres d'Angers et de Saumur du 21 portent que les troupes du duc de Rohan, estant allées au devant du canon et des munitions que le mareschal de la Mesleraye envoyoit de Nantes par la riviere, ont pris touttes les munitions sans pouvoir attraper le canon, qui a pris le fil de l'eau et est retourné vers Nantes; que ce mareschal s'estoit excusé, sur sa maladie des gouttes, de ne pouvoir aller commander à ce siege, et que cela avoit obligé la Cour d'y renvoyer le mareschal d'Hocquincourt; que Mme de la Mesleraye estoit arrivée en Cour pour excuser Monsieur son mary, et que neamoings elle avoit donné à cognoistre que si l'on vouloit accorder à M. le Grand Maistre de l'artillerie, son filz, la survivance de lieutenant de roy en Bretagne et des gouvernementz de Nantes et Blavet, qu'on luy en a desja promis deux fois, M. de la Mesleraye se feroit porter sur un brancart au siege d'Angers, /34v/ plustost que de refuser à rendre ses services à Sa M. Les passionnés pour la Cour y publient que M. de Rohan demandoit le gouvernement de Saumur pour sa seurté, avec le domaine du Pont de Cé en propre, et qu'on luy vouloit bien accorder le dernier article mais non pas le premier; que les troupes du comte Broglio estant arrivées le 20 à 2 lieues de Saumur, le Roy y estant allé avec le cardinal Mazarin pour les veoir passer, et qu'elles alloint investir Angers, où elles devoint grossir celles qui y sont desja, jusques au nombre de 4 à 5000 hommes; que le mareschal d'Hocquincourt se tentoit de prendre cette ville là dans 3 jours, et qu'aussytost apres, la Cour iroit à Tours, de là à Orleans, apres à Rouen, et ensuitte à St. Germain. Les gendarmes du roy n'ayant rien peu toucher de ce qui leur est deut, se sont retirés, ne pouvant plus servir.

D'autres advis d'Angers du 24 confierment le precedent et adjoustent qu'on s'y deffendoit fort bien, et qu'on y attendoit avec impatiance le secours de M. de Beaufort; ce que les lettres de Saumur du 24 advouent, adjoustent que les assiegés peuvent empescher que le canon n'y arrive, et le couler à fondz, le comte de Rieux, filz de M. d'Elbeuf, s'estant pour cest effect emparé du post de La Pointe, une lieue de là sur le bord de la riviere; mais que le comte de Quinçay a pris le pont du Pont de Cé, pour luy oster la communication avec Angers. Le cardinal Mazarin fit courir le bruit, ce jour là, que l'accommodement estoit fait, sans en dire les conditions; ce qui s'est trouvé faux, comme l'on sceut hier par l'arrivée de M. de Chastellus, qui en estoit party le 26; lequel dit que le mareschal d'Hocquincourt avoit demandé une conferance au duc de Rohan, celuy cy la luy avoit accordée, et qu'ilz s'estoit abouchés sur le pont d'Angers; où estoint venus aussytost des depputtés de la ville, qui avoint declaré à ce duc, en presence de l'autre, qu'ilz ne vouloint point d'accommodement que le Cardinal ne feut hors du rouyaume, et que pour luy, s'il estoit en dessain de s'accommoder, ilz le prioint de sortir tout à fait de la ville, sinon de rentrer promptement, comme il fit, apres avoir fait grande civilitté à ce mareschal; mais on croit que ce feut une adresse de ce duc pour l'amuser. L'on avoit tenu conseil à Saumur si on leveroit ce siege, pour aller combattre M. de Beaufort, qui estoit arrivé dès le 24 à Montdoubleau dans le Vendosmois, à quoy le cardinal Mazarin avoit conclu, et vouloit y aller luy mesmes commander l'armée; mais on suivit l'advis du mareschal de Turenne, qui estoit seulement d'y envoyer de la cavalerie, et de laisser Angers investy par l'infanterie; et parce qu'il y en a peu, l'on envoya promptement ordre au comte d'Harcourt d'en faire venir deux regimentz avec un autre de cavalerie. Dès qu'il se parla dans le camp d'aller au devant de M. de Beaufort, les troupes dirent hautement qu'elles ne marcheroint point sans argent; sur quoy l'on manda le marquis de la Vieuville, qui partit de Tours le 24, à 2 heures du matin, pour se rendre à Saumur. En mesme temps, on envoya ordre à M. le duc d'Espernon d'y faire marcher les troupes qui sont en Bourgogne, lesquelles en passant doivent tanter la surprise de la ville de La Charité sur Loire, que le comte de Palluau voulut surprendre la semaine passée, /35/ y ayant, à cette fin, mené la pluspart de ses troupes du blocus de Mourron; mais son dessaing ne luy reeussit pas, et cepandant qu'il songeoit à l'executter, le marquis de Persan a trouvé, chez les amis de M. le Prince qui sont au voisinage, un secours de 250 hommes, qui sont entrés dans Mourron avec un grand convoy de quantité de betail, dont la place avoit grand besoing, estant asses desnués d'hommes et de vivres. L'on a envoyé aussy ordre de la Cour à ce comte de mener en Anjou une bonne partie des troupes qu'il a devant cette place, où les contributions luy ont valu plus de 100 mille escus despuis 4 ou 5 mois. Le marquis de Sourches, grand prevost de l'hostel, avoit ordre de se retirer de la Cour; mais ayant trouvé moyen de veoir le cardinal Mazarin, il s'est raccommodé. L'on a donné la survivance du gouvernement de Picardie au prince d'Harcourt, et promis le gouvernement d'Arras au sieur de Mondeja, creature du cardinal Mazarin; mais d'un costé l'abbé d'Jacinte s'en presse fort pour le conserver à M. de Ste Mesmes, qui en offre 100 mille livres au Roy et 50 mille escus aux heritiers de feu M. de la Tour; et d'autre costé, M. Le Tellier le demande pour M. Tilladet, son beaufrere.

Le marquis d'Aumont ayant achepté despuis peu le gouvernement de Tours de M. de Chasteauneuf, auquel il en a donné 120 mille escus d'argent comptant, il voulut ses [ces] jours passés faire couvrir un grand bateau pour aller à Saumur querir le Roy, qui est à present sur le point d'y aller. Les batteliers y firent grand bruit contre luy, disant qu'il vouloit faire venir le Mazarin; et l'ayant menacé de le jetter dans l'eau, il feut contraint de se retirer promptement, ne s'y voyant pas en seurté; et ce feut pour ce subject que le marquis de la Vieuville en partit cy [sy] matin; à quoy les lettres de Tours du 22 adjoustent que le Grand Conseil y estoit arrivé, que les Conseil des finances y estoit encor, et M. de Chasteauneuf aussy fort visitté, lequel ayant esté prié par la Reyne d'y demeuré 15 jours, de crainte que son retour à Paris ne donnat de plus mauvaises impressions que celles que l'on [a] du gouvernement du present, a non seulement donné ces 15 jours mais encor 2 mois, apres lesquelz il ira à Bourges.

Le 25 un courrier arrivé de la Cour vint publier une nouvelle que le prince de Tarante avoit esté defait aupres de Xaintes par M. de Folleville, mareschal de camp de l'armée du comte d'Harcourt, qu'on luy avoit tué 150 hommes, pris 200 prisonniers, et qu'il s'estoit sauvé dans Xaintes apres avoir esté blessé; mais parce que les amis du cardinal Mazarin qui sont à Paris en petit nombre ont accoustumé de faire courir le bruit de quelque advantage de la Cour tous les jours qui preceddent une assemblée du Parlement, comme il en devoit avoir le lendemain, cette nouvelle ne trouva pas de credit; et despuis l'on a sceu la verité du fait par les lettres de Xaintes du 23, qui portent que ce prince ayant sceu que les sieurs du Plessis Belliere et de Folleville avoint investy cette ville là, y entra avec 400 chevaux aux travers de leurs trouppes, apres une escarmouche dans laquelle il en tua beaucoup plus des leurs qu'il n'y en perdit des siens. Ses partisans escrivent qu'il en tua 200 et n'en perdit que 50, entre lesquelz estoint 20 de ses gardes et leurs cappitaines, et que le lendemain on y traittoit de l'eschange des prisonniers. Les plus desinteressés en estiment la perte à plus pres esgale de part et d'autre.

/35v/ Les advis de Bourdeaux du 19 portent qu'on y avoit presque achevé les fortiffications, et où plusieurs conseillers de Bourdeaux l'estoint allés trouver pour y tenir un conseil d'importance sur l'estat present des affaires de la province; que le comte d'Harcourt n'estoit pas encor sorty du Perigord, mais qu'il avoit fait suivre le sieur du Plessis Beliere en Xaintonge par une bonne partie de cavalerie, commandée par le sieur de Folleville, mareschal de camp, faisant tousjours mine de vouloir investir Xaintes, d'où l'on escrit que les choses estoint fort disposées à la deffense, qu'il y avoit une garnison de 1200 hommes effectifs, outre les habitans, et que les troupes de ce comte n'avoint ny vivres ny munitions, ny argent pour faire cette entreprise, qu'elles estoint d'allieurs si fatiguées qu'elles se resoluoint hautement de ne plus servir si on ne leur donnoit de l'argent, ou du moing des quartiers pour se refraischir; que M. de Marchin s'estoit allé s'emparer des postes de Villerealle et Montpeyrat [Montpezat] dans le Quercy, afin d'enfermer M. de St. Luc du costé de la Haute Guyenne; que l'armée de celuy cy, qui est de 2000 hommes, estoit en presence de celle de M. le prince de Conty, qui estoint de force esgalle, et qu'ils estoint sur le point d'en venir aux mains.

Despuis il est venu nouvelle de Bourdeaux, du 22, que M. le Prince estoit allé par Bergerac, trouver M. de Marchin en Quercy pour aller charger MM. de St. Luc et de St. André, qu'on dit avoir esté entierement defaitz au dessus d'Agen.

Le 26 le comte de Chavagnac arriva icy et apporta une lettre de M. de Nemours à S.A.R., datté du 25 d'Erson [Ressons?], à une lieue de Compiegne, où il estoit arrivé dès le 24 au soir, avec 5 mille chevaux et 3 mille fantassins effectifs, qui s'y reposerent le 24 et en partirent le lendemain, pour poursuivre leur chemin vers Mantes, où elles doivent arriver demain. Ilz n'ont trouvé aucung obstacle à leur passage, quoy que M. d'Elbeuf eut ramassé 3000 hommes à Roye pour s'y opposer. Ilz ont pris 2 partis chacung de 20 à 25 chevaux de celuy cy, qui les estoit allés recognoistre et qui sont la pluspart ses domestiques. Le mareschal d'Aumont avoit receu ordre de la Cour de quitter le Boulonnois, pour aller joindre avec ses troupes M. d. Elbeuf; mais parce qu'ilz ne sont pas d'accord pour le commandement, le premier se contenta d'envoyer à celuy cy la pluspart de ses troupes, qui estoint en fort petit nombre. La Cour ayant sceu que le duc de Nemours faisoit estat de passer la Seyne sur le pont de Mantes, avoit envoyé ordre aux tresoriers de France de le faire rompre, ce que les habitans, qui y sont en armes, ont empesché, et fort bien receu le duc de Sully, gouverneur, qui y est pour le service de S.A.R. Les troupes du duc de Nemours vivent avec beaucoup de regle. M. de Beaufort fait contenir les siennes en quelque façon, quoy qu'avec peyne et difficulté; mais celles de la Cour font tous les desordres imaginables, ayant forcé un couvent et violé les religieuses aupres d'Angers, quoy qu'il y eut un garde de la reyne pour l'empescher.

/36/ Le mesme jour le Parlement s'assembla, et S.A.R. estant partie pour y aller, mais comme il estoit tart, et qu'il aprit en chemin que l'on y [l'on n'y] desliberoit que sur les rentes et gages des officiers, elle s'en retourna sur ses pas; et l'on n'y fit autre chose qu'ordonner que les receveurs auroint une surceance de 15 jours pour le payement des arrerages des rentes, pourveu qu'ilz payassent presentement le courant, ce qu'ilz ont commencé de faire.

Le 27 le Parlement s'assembla encor sur une lettre de cachet du Roy qui estoit arrivée, portant ordre d'informer sur l'entrée du duc de Nemours en France avec les ennemis de l'Estat, et sur la marche du duc de Beaufort comme ayant en main les armes contre le Roy; mais parce que S.A.R. n'y estoit pas, l'on remit l'assemblée au lendemain, et on luy deputta MM. Doujat et Menardeau pour la prier de s'y trouver. Elle leur respondit qu'il n'estoit pas à propos d'y desliberer là dessus, que c'estoit des inventions pour amuser les espritz, qu'elle sçavoit fort bien ce qu'elle faisoit, et qu'elle ne faisoit marcher ces 2 princes avec leurs troupes que pour faire ce que le Parlement l'avoit prié de faire pour l'expulsion du cardinal Mazarin.

Le 28 S.A.R. ne laissa pas de se trouver à l'assemblée du Parlement, où elle fit un tres beau discours pour empescher qu'on desliberat sur cette lettre de cachet, ayant dit entre autres choses qu'elle s'estonnoit extremement de ce que plusieurs s'opiniastroint à vouloir desliberer sur une lettre qui avoit esté faitte dans Paris sur un blanc signe; qu'ilz sembloint par là qu'ilz aymassent mieux veoir perir un oncle du Roy et 4 princes du sang, q'ung estranger qu'elle traittat d'insolent et d'impertinent; qu'elle avoit souvent dit, et le repettoit encor, que c'estoit par son ordre que M. de Nemours avoit mené ses troupes, qu'elle respondoit de tous leurs dessaings, et protestoit qu'aussytost qu'on auroit chassé le cardinal Mazarin, elle les envoyeroit en Flandres; et que si elles en faisoint le moindre difficulté, elle se mettroit à la teste de l'armée du Roy pour les faire perir. L'advocat general Talon y fit aussy un fort beau discours contre le cardinal Mazarin, et conclut qu'il falloit que le Parlement escrivit au Pape et luy fit instance de citter ce cardinal à Rome, pour rendre conte de ses actions, puisqu'il sçavoit que Sa Sainteté y tesmoignoit quelque disposition; qu'on luy accordat plustost un arrest d'absolution, avec asseurance de pouvoir jouyr, estant retiré en Italie, de ses benefices et de quelques pensions; et qu'on envoyat des deputtés en Cour pour negotier son esloignement aupres de Leurs M. On adjousta seulement que le discours de S.A.R. seroit enregistré; et on commencea d'opiner, et l'assemblée feut remise à aujourd'huy pour desliberer si on deslibereroit sur cette lettre de cachet et sur les conclusions des Gens du roy.

Le duc d'Amville partit d'icy le 26 pour s'en retourner à la Cour, d'où l'on eut hier advis du 26 que le poste de La Pointe avoit esté pris d'assaut par les troupes mazarines, et que le chevalier de Jersey y avoit esté fait prisonnier.

Le Milord d'Igby et le comte de Grandpré ayant receu ordre de la Cour de venir en diligence avec leurs troupes, pour se saisir du passage et des rivieres d'Oise et de Seyne, le premier a demandé du pain de munition à la ville de Beauvais, /36v/ qui luy en a refusé, comme elle avoit fait à M. de Nemours. Ensuitte il a voulu s'enparer des postes de Creil et de Beaumond [Beaumont] sur l'Oise, lesquelz luy ont fermé les portes. Ilz cottoyoint cette riviere avec 400 chevaux qu'il a, attendant que le comte de Grandpré l'aye joint. La ville de Mantes est en armes, resolue aussy de refuser l'entrée à toutte sortes de troupes indiferenment, quoy que le duc de Sully, son gouverneur, aye tesmoigné que S.A.R. avoit donné ordre à empescher que celles de M. de Nemours n'y fissent aucung desordre, ny aux environs; ce que Mme de Sully ayant esté representé ce matin à S.A.R., elle a envoyé M. de St. Quentin, lieutenant de ses gardes du corps, avec 20 gardes. pour conserver cette ville et les lieux voisins, ce qui fait croire qu'elle consentira aux passages de ses [ces] troupes. Quelques officiers des quartiers de Paris sont allés ce matin offrir à S.A.R. de choisir 3 à 4000 hommes dans leur compagnie bourgeoise, pour aller à Mantes favoriser le passage de M. de Nemours, dont elle les a remertié, disant qu'elle ne croyoit pas qu'il feut necessaire, mais qu'en cas qu'il en feut besoing, qu'elle les en advertiroit.

Un courrier arrivé cette nuict a apporté nouvelle à M. le Coadjuteur que le Pape l'avoit fait cardinal dans le consistoire tenu le 19 du passé. Sa Sainteté l'avoit declaré le premier, suivant la nomination du Roy; le 2, M. Pimantelly, archevesque de Seville pour Espagne, le 3e, M. Ghisi, secretaire d'Estat de Sa Sainteté; le 4, M. Lomeleno, tresorier de la Chambre apostolique; le 5, M. Homodei, clerc de la mesme chambre; le 6, M. Ottobuoni; le 7, M. Corradi, auditeur de la Rotte; le 8, le sieur Santta Croce; le 9, M. Aldobrandino; et le 10, le prince Frederick, lantgrave d'Armstad, nommé par l'Empereur. Les 2 autres chapeaux vacans ont esté retenus in petto.

Le matin, le Parlement s'estant assemblé, S.A.R. y estant, le president Le Bailleul a incisté à faire desliberer sur les conclusions de MM. les Gens du roy du 29 du passé; mais les Enquestes ont fait si grand bruit là dessus qu'elles l'ont empesché. S.A.R. y ayant apporté par escrit la declaration qu'elle y fit de bouche le mesme jour, elle a esté leue et ensuitte enregistrée; et parce qu'apres cela il n'y avoit pas assez de temps pour desliberer, l'on a contesté sur le jour auquel l'on remettroit l'assemblée. Le president Le Bailleul vouloit que ce feut au plus tard lundy prochain, mais S.A.R. l'a fait remettre à mardy. Les 3 chambres de la Cour des aydes se sont aussy assemblées pour aviser aux moyens d'asseurer le payement des rentes et gages des officiers. Ilz ont donné arrest portant que les receveurs y seront contraints par touttes sortes de voyes; que les biens des ordonnateurs, qui sont les surintendants et directeurs des finances, seront saisis et arrestés pour la seurté du payement; et que les autres compagnies souveraines seroint conviées de venir à la Cour des aydes pour deliberer sur moyens de mieux asseurer lesdites rentes et gages d'officiers.

/38/ De Paris le 8 mars 1652

Don Joseph de Pinos, ambassadeur de Catalougne, est revenu puis 5 ou 6 jours de Portugal, où il n'a peu obtenir le secours qu'il esperoit pour la Catalougne, les Pourtugais ne l'ayant pas voulu donner qu'à condition que la France traitteroit avec eux, et s'obligeroit de ne point faire de paix sans eux avec l'Espagnol, ou du moings sans se reserver la faculté de les pouvoir tousjours assister; mais ilz font à present une puissante diversion, le prince de Portugal estant party de Lisbonne avec une armée de 10 mille hommes pour aller attaquer quelque place importante du costé d'Estramadure [Extremadura]. Cest ambassadeur s'en va à la Cour, rendre compte de cette negotiation et veoir s'il pourra obtenir quelque secours pour cette province.

Les traittans des tailles de l'eslection de Meaux ayant dit aux rentiers de la Ville que S.A.R. avoit envoyé des commissions dans cette eslection, pour y lever les deniers affectés aux payement de leur rentes, ceux cy s'assemblerent dans l'Hostel de Ville sur ce subject, et firent une deputation à S.A.R., pour la supplier de leur vouloir laisser les deniers destinés pour leur payement, et de leur vouloir continuer sa protection; à quoy elle leur respondit qu'elle n'avoit pas songé à touscher à ce qui apartenoit aux rentes, qu'elle avoit seulement donné ordre pour lever des vieux arrerages dont quelques partisans avoint traitté, et des assignations qui avoint esté données aux chevaux legers du roy et d'autres Mazarins; mais pour leur tesmoigner qu'elle ne leur vouloit point faire de tort, si l'on levoit quelque chose qui leur apartient, elle l'envoyeroit à l'Hostel de Ville.

Le comte de Langeron ayant laissé dans son gouvernement de La Charité 400 hommes des troupes de S.A.R., s'en vient à Paris il y a 3 semaines, et y est encor. Pendant son abscence cette ville se voyant menacée d'ung costé par les troupes du comte de Palluau, et de l'autre par celles de Bourgogne, resolut d'en faire sortir celles de S.A.R. et d'y laisser passer le marquis d'Uxelles, qui conduit celles de Bourgogne en Anjou. Pour cest effect elle a corrompu la moitié de cette garnison, et a fait desbander en donnant soubz main demy pistolle à chasque soldat qui a voulu s'eschaper; en sorte que ne restant plus que 200 hommes, et les habitans se voyant les maistres, on contraint ceux qui y estoint d'en sortir, leur ayant permis de s'embarquer sur la Loire pour aller joindre M. de Beaufort, et ont envoyé dire au marquis d'Uxelles, qui n'estoit pas loing de là, qu'ilz le laisseroint passer quand ilz voudroint. On croit qu'il a desja passé.

Le comte de Fiesque estant allé la semaine passée trouver M. de Longueville à Rouen, de la part de S.A.R. et de M. le Prince, et le sollicitter d'entrer dans leur party, en revient le 2 au soir, et rapportat que ce duc estoit en termes de se declarer en plain Parlement de Rouen, quoy que Prioleau, son secretaire, soit retourné despuis 15 jours à la Cour de sa part.

La ville de Mantes ayant tousjours esté divisée sur la resolution du passage de M. de Nemours, quelques habitans assemblés par un tresorier de France, qui est creature du mareschal de l'Hospital, resolut, dans une assemblé qui [qu'ilz] tiendrent, de rompre leur pont suivant les ordres qu'ilz en avoint de la Cour, et commencerent mesmes le 19 à defaire le pavé; mais le duc /38v/ de Sully, leur gouverneur, y accourut promptement et leur fit quitter prise, disant qu'il falloit desliberer quelle arche l'on romproit pour la faire restablir avec moings des despense, et qu'on tiendroit le lendemain une assemblée de ville pour ce subject. Cette assemblée feut eludée le second, parce que ce duc amusa les habitans, et n'y s'y trouva pas; et dans ce temps là, le sieur de St. Quentin y estant arrivé avec les gentilhommes et gardes de S.A.R., publia qu'elle y venoit en personne le lendemain; et afin qu'on adjousta plus de foy à ce qu'il disoit, il fit marquer tous les logementz pour S.A.R. et pour sa maison, en sorte que les habitans n'en doutantz plus, ne toucherent pas davantage au pont, où les gardes de S.A.R. se posterent; et cepandant l'avangarde de M. de Nemours s'estant avancée, 500 chevaux y arriverent le 2e; et on en fit passer 200, pour faire publier dela la riviere que toutte la cavalerie estoit passée, à cause que le mareschal d'Aumont et Milord Digby avoint passé la riviere à Poissy pour tascher de se jetter dans Mantes, où ceux qui en avoint voulu rompre le pont leur devoint favoriser l'entrée. Le 3e, le reste de l'avantgarde de M. de Nemours y arriva, et passa ce jour là sans aucune resistance. Le reste ne passat que le 4 au matin, sans y loger et sans y faire le moindre desordre, ayant vescu avec cette regle despuis 27 jours qui [qu'ilz] sont en marche. Ilz font le nombre de 7 mille combatans effectifs, sans leurs valetz, sçavoir 4 mille chevaux et 3 mille fantassins, tous vieux soldatz et fort lestes, avec 4 pieces de canon, et tout compris l'on y a conté environ 30 mille bouches. M. de St Quentin s'en revient le 4 avec les gentilhommes et gardes de S.A.R., et mena icy le maire de Mantes, qui ne se croyoit plus en seurtté par dela, parce qu'il avoit favorisé ce passage. Le duc de Sully suivit M. de Nemours, et ilz arriverent icy ensemble le 5 avec le baron de Clinchamp, son lieutenant general, et quelques autres des principaux officiers de cette armée, escortées par 100, chevaux, pour conferer avec S.A.R.

Le comte de Grandpré n'est pas venu joindre Milord d'Igby, et l'on asseure qu'il a promis à S.A.R. de ne porter point les armes contr'elle; mais le mareschal d'Aumont joignit ce milord le 2 à Poissy, avec 200 chevaux, apres avoir fait, ce jour là, une marche de 16 lieues sans desbrider; et ilz passerent la Seine avec 400 chevaux et 100 fantassins du regiment de Piedmont, pour s'aller jetter dans Mantes; mais ilz y arriverent tropt tard de 6 heures, le premier ayant esté amusé au passage de l'Isle Adam sur Loire [lire: Seine], dont les habitans, suivant les ordres de S.A.R., tirerent sur quelque infanterie qu'il faisoit descendre sur cette riviere dans des batteaux. Ce mareschal voyant donc qu'il n'estoit plus temps, repassa la Seine le 4 à St Germain en Laye; et en mesme temps le duc d'Elbeuf, qui suivoit la piste de l'armée de M. de Nemours, s'avancea à Mantes par le mesme chemin qu'il avoit tenu, avec 600 hommes, la pluspart cavalerie, et y envoya un trompette pour demander passage, lequel arriva en mesme temps que l'arriere garde de M. de Nemours achevoit d'y passer; ce qu'on luy refusa d'abord, mais ce ne fut que sur la crainte d'estre pillé. Cepandant, ce mareschal ayant esté le 5 à la chasse dans la foire [lire: forest] de St Germain, les paysans d'alentour remarquerent que quelques /39/ Mazarins de Paris le feurent trouver là, et confererent avec luy; et despuis, il fait loger ses troupes dans les villages et terres que M. le Prince possedde dans la vallée de Montmorency, en attendant la jonction de M. de Vaubecourt, qui le doit joindre demain, avec 2000 hommes qu'il a tiré des garnisons des places frontieres, qui en sont touttes denuées.

Sur cette aproche, le sieur de Chasteauvert, qui levoit les tailles par là aux environs, avec 200 hommes, en vertu d'une commission de S.A.R., en deslogea promptement et revient à Paris.

Il y a un arrest du Conseil d'en haut fort estendu; lequel, apres une longue desduction de plusieurs raisonnementz, casse touttes les commissions que S.A.R. a donné pour lever les tailles et les gens de guerre, deffenses à touttes personnes de lever ny l'ung ny l'autre, à peyne de payer deux fois. S.A.R. fit travailler à son manifeste.

Il y a advis de Mezieres, place frontiere de Champagne, que ceux de Stenay et de Damvilliers ont rompu la neutralité avec ceux de Sedan, qu'ils courent comme ennemis.

Le comte d'Olonne, cornette des chevaux legers du roy, espousa le 2, à 5 heures du matin, Mlle de la Houppe l'aisnée, à qui Mme de la Houppe, sa mere, a donné 10 mille livres de rente en fond de terres, et 20 mille livres d'argent comptant seulement.

On escrit du Mans, du 28 au soir, que M. de Beaufort estoit aux portes de cette ville là avec ses troupes, qui ont grossy jusques au nombre de 6 mille hommes; qu'on y avoit fait rompre le pont, mais il l'a fait restablir; qu'il avoit envoyé un de ses gardes aux habitans de Yevré [Yvré], une lieue de là, pour leur dire que si leur pont n'estoit refait dans le lendemain à 8 heures, il brusleroit leurs maisons; qu'il avoit encor prix ceux de La Suze, et avoit investy Le Mans de tous costés, ce qui embarrasoit fort M. de Termes, qui en est gouverneur, lequel n'esperoit point de secours; et que le sieur Quentin, tresorier de France, en estoit party ce jour là avec 8 livres seulement qu'il avoit pris de la recepte des tailles, avoit esté attaqué à une lieue de là par 50 cavaliers et M. de Beaufort, qui luy osterent cest argent.

On mande de Saumur du 28 que le cardinal Mazarin avoit esté declairé generalissime des armées du Roy, nonobstant la demande que le comte d'Harcourt faisoit de la charge de maistre de camp general des armées, comme estoit le mareschal de Biron du temps d'Henry 4; que le gouvernement d'Arras a esté donné au sieur de Mondeja, et celuy de Rue, qu'il possedoit, à M. de Tilladet; que le Grand Prevost de l'hostel se devoit retirer le lendemain à petit bruit, quoy que despuis qu'il en avoit receu l'ordre il eut veu le cardinal Mazarin; et que 4 pieces de canon estant arrivées au camp devant Angers, les habitans avoint tesmoigné d'estre disposés à l'accommodement; que sur cela on y envoyat des articles toutz dressés au duc de Rohan, qui les signa; et que 200 hommes du regiment des gardes y feurent receus le 29, pour en sortir quelques jours apres; et despuis, on n'en a peu avoir /39v/ aucune nouvelle certaine, quoy qu'on eut publié icy une lettre du Roy au mareschal de l'Hospital contenant la reddition de cette ville là, sans qu'on aye peu sçavoir aucune condition; en sorte qu'il n'y a que les Mazarins qui croyent cette nouvelle, car les Frondeurs ne la croyent point, et les desinteressés en doutent fort et croyent seulement qu'on en fait le traitté; neamoings, le 4, S.A.R. eut nouvelle par le retour du courrier qu'elle avoit envoyé à M. de Beaufort, que celuy cy s'estant avancé à 15 lieues pres d'Angers, y avoit receu la nouvelle de la redition de cette place, qui luy avoit esté aportée par un gentilhomme du duc de Rohan, contre lequel il pestat fort de ce qu'il avoit [qu'il l'avoit] fait venir jusques là, pour se rendre sans estre pressé, et renvoya ce gentilhomme sans vouloir ouvrir sa lettre d'advis; sur quoy on remarqua que S.A.R. dit que M. de Rohan avoit commencé en duc de Rohan et finy en Chabot. Il est vray que les lettres de Saumur du 2 et 3 continuent à dire que cette place est rendue, mais que les conditions en sont si secrettes qu'on n'avoit peu les penettrer; qu'elles sembloint fort desadvantageuses pour la Cour, puisque le Roy ny le cardinal Mazarin n'y entroint pas, outre qu'il y a advis certain, du 3e, que les deux pontz de Cé tenoint encores, et que le comte de Rieux s'y est jetté dedans avec 600 mousquetaires; et ainsy la diversion ne cesse point encor en Anjou, où il n'y a que 3 mille hommes des troupes du Roy, qui ont pillé non seulement touttes les maisons des gentilhommes mais encore tous les couventz de religieuses; neamoings la Cour n'avoit pas laissé de se resoudre à partir de Saumur le 4, pour aller à Chinon, et de là à Richelieu, mais il n'y a pas encor nouvelle qu'elle en soit partie. Les advis de Bourdeaux du 26 portent que M. le Prince estant allé, avec une diligence extraordinaire, joindre Monseigneur son frere au dessus d'Agen, ilz avoint attaqué conjoinctement aupres de Miradoux l'armée du marquis de St Luc, qui estoit de 2 mille fantassins et 700 chevaux, et l'avoit defaitte entierement, ce marquis s'estant sauvé avec quelque cavalerie dans Lectoure; que 900 des siens s'estantz retirés dans Miradoux soubz la conduitte du sieur Marin, mareschal de camp, y avoint esté assiegés, et que M. le Prince les vouloit contraindre à se rendre prisonnier de guerre; que Son A. luy avoit pris les 12 drapeaux qu'ilz avoit avec son bagage; que cette defaitte asseuroit toutte la Haute Guyenne à M. le Prince; que M. de Marchin estoit encor dans le Quercy, pour reduire Villereale, Montpeyrat, et Biron, qui estoint les seules places qui luy resistoint sur la Dordogne; et que celuy cy ayant demandé un delay de quelques jours pour se resoudre, avoit capitulé, et le baron de Biron s'estoit mis du party de M. le Prince; et que la ville de Montauban s'estoit declarée neutre et ne vouloit plus recevoir le marquis de St Luc; que le marquis de Poyanne, gouverneur de Dax, ayant voulu remuer contre Son A., elle y avoit envoyé quelques troupes pour luy rompre ses forges et ses moulins, qui est tout son bien; que despuis, il avoit aussy esté defait et pris prisonnier; et que MM. les princes estant retournés à Bourdeaux, y avoint fait chanter le Te Deum pour cette victoire. Les lettres du 29 confierment cette /40/ deffaitte, mais non pas si grande, avouant qu'il n'y avoit que 200 hommes tués, et que les 900 hommes qui s'estoint retirés dans Miradoux y estoint encor, assiegés par M. le Prince, qui ne les vouloit recevoir que prisonniers de guerre, d'autant plus qu'ilz n'avoint ny vivres ny secours à esperer; que le comte d'Harcourt ayant voulu passer la Dordogne avec mille chevaux, pour les aller secourir, le general Marchin luy en avoit defait 300; que M. le Prince avoit fait prisonnier un commissaire qui portoit à ce marquis un ordre d'envoyer ses troupes en Anjou, accompagné de commissions pour lever dans la generalité de Montauban 14 regimentz d'infanterie et 10 de cavalerie; et que les habitans de Montmarsan [Mont-de-Marsan] avoit battu le marquis de Poyanne, qui les vouloit assieger.

Les villes de Languedoch continuent à pancher dans le party de S.A.R.

On mande de Dijon que M. d'Espernon envoyoit 5 regimens vers Mourron pour y relever ceux qui y sont, et qui [qu'il] se reservoit seulement celuy de Navarre d'infanterie, et celuy de Coeuvres de cavalerie, qui sont dans le poste de Pouilly, proche Bellegarde, dont la garnison ne laisse pas de courir vers Dijon, ayant pris, le 27 du passé, 4000 rations de pain aux portes de St Jehan de Losne, conduitz par 40 hommes qu'elle fit prisonnier; et que le Parlement de Dijon s'estant assemblé le 28, sur l'ordre qu'il avoit eu de veriffier la declaration contre M. le Prince, n'y vouleut pas touscher.

L'armée du duc de Nemours est aux environs d'Houdon et de Dreux, où elle se rafraischit. L'on tient hier Conseil pour desliberer ce qu'elle devoit devenir, et ce matin S.A.R. a envoyé un courrier à M. de Beaufort pour luy porter les ordres qui feurent resolus. Elle a fait un present au baron de Clinchant d'un diamant qui a couté 12 mille livres, et d'un escharpe de 100 pistolles. Elle fait faire quantité d'autres escharpes bleues de moindre prix, pour donner aux autres officiers de cette armée. M. de Beaufort est revenu à Chasteauneuf [en Thymerais], proche d'Anet, d'où il peut joindre M. de Nemours en 2 jours.

/42/ De Paris du 15 mars 1652

Le 9 du courant on sceut la verité de ce qui s'estoit passé au siege et à la redition d'Angers, par l'arrivée du sieur de Fontenailles, qui estoit aupres du duc de Rohan, de la part de S.A.R., pendant tout le siege. Il raporta que ce duc avoit esté tres mal servy, premierement par le chevalier de Gersey, qui avoit laissé prendre le poste de La Pointe, où il commandoit avec 600 fantassins que M. de Rohan luy avoit donné, et où il se pouvoit deffendre avec d'autant plus de facilité qu'il n'estoit attaqué que par 70 dragons de Seneterre, qui s'emparerent seulz de ce poste, où il ne vouloit pas seulement mettre l'espée à la main, et se laissa amener prisonnier à Saumur, dont on le laissa sauver 3 jours apres. En second lieu, ce duc feut trahy par le marquis de la Barre, qui avoit fait son traitté particulier avec la Cour 2 jours auparavant que les habitans commenceassent à capituler, comme ilz firent, contre le sentiment de ce duc, apres que 4 pieces qu'on y avoit mis en batterie eurent faitte une grande bresche et que le mineur y feut attaché. Les principaux articles de leur traité sont: qu'ilz recevront 4 compagnies des gardes dans la ville et dans le chasteau, où elle ne feront aucung desordre; que les habitans payeront les arrerages des tailles qu'ilz doivent; qu'il y auroit amnestie generalle de tout le passé; que le marquis de la Barre pourroit reprendre quelques pieces d'artillerie qu'il y avoit fait conduire. Quant au duc de Rohan, on luy fit quantité de belles offres, pourveu qu'il voulut aller à la Cour; mais il ne voulut pas s'y fier, et toute la composition qu'il fit, pour luy, feut qu'il sortiroit comme d'une place de guerre, avec son bagage et touttes ses trouppes qui luy restoint, et pourroit ce [se] retirer partout où bon luy sembleroit, excepté dans le Pont de Sé [Cé]; et que la Duchesse sa femme pourroit demeurer 8 jours dans Angers, pour donner ordre à ses affaires, et apres se retirer où bon luy sembleroit. Ce duc ayant mené 250 hommes qui luy restoint à l'armée de S.A.R., M. de Beaufort, fasché contre luy, ne les avoit pas voulu recevoir; mais dès le 9, au matin, S.A.R. luy envoya ordre de les recevoir, ayant esté informé de la façon dont tout c'estoit [s'estoit] passé; et M. de Rohan, pour luy en rendre conte, arriva icy le xi au matin et feut fort bien receu de S.A.R., qui luy dit d'abord qu'elle sçavoit bien qu'il n'y avoit pas de sa faute, et qu'il y avoit proceddé en homme d'honneur.

Le Pont de Cé ayant esté ensuitte attaqué par les mesmes troupes qui estoint devant Angers, feut pris d'assaut le 3; et il y eut 200 hommes tués qui estoint dedans, commandés par le sieur Alexandre, lequel s'estant retiré dans le donjon. Il demanda quartier, qu'on ne luy auroit pas accordé sans le mareschal d'Hocquincourt, qui le cognoissoit. Le comte de Rieux avoit voulu s'y jetter dedans avec 600 mousquetaires, mais Alexandre ne l'y voulut pas recevoir, de peur qu'il voulut s'emparer de la place. Despuis, les soldatz des gardes qui sont dans Angers y ont fait des desordres qui ont obligé les habitans à se repentir de s'estre reduitz cy tost [si tôt], et l'on n'y demande pas moings de 50 mille escus d'arrerages.

Le x on eut advis de Saumur, du 6, que le mareschal de la Mesleraye y estoit arrivé, et qu'on luy avoit donné la commission pour commander en Anjou, en attendant qu'on eut pourveu /42v/ au gouvernement de cette province, qu'on parloit de donner au sieur du Plessis Praslin, et de faire rendre au duc de Rohan la somme qu'il en avoit donné ou asseuré au feu mareschal de Brezé; que celuy de la ville et chasteau d'Angers avoit esté donné au sieur de Montreuil, et celuy du Pont de Cé au sieur de Fontenelle; que depuis, on avoit donné ordre à l'armée de marcher vers Amboise, pour se rendre à Boisgency [Beaugency], où touttes les troupes qui viennent de Picardie, Champagne, Bourgogne, et Mourron ont leur rendésvous au 15, qui est aujourd'huy, pour combattre celles de MM. les princes; qu'on y avoit donné quelque argent à quelques officiers, et qu'on en faisoit esperer d'autres; que ceux de l'armée du comte d'Harcourt en avoit envoyé deux à la Cour, pour demander que, de tous les lieutenantz generaux qui y sont, qu'il n'y envoye que deux qui puissent commander, et autant de mareschaux de camp, et que les autres n'y puissent servir qu'en qualité de volontaires; que nonobstant cela, l'on avoit fait quelques nouveaux mareschaux de camp, et que les sieurs de Beaujeu, Roncerolles, Clinvilliers, Leinville, Gurieux, du Tort, et de Vennens demandoint estre lieutenantz generaux; que le courrier de M. le cadinal de Retz y estoit arrivé pour remertier Leurs M. de sa promotion, et n'avoit veu le cardinal Mazarin que par occasion, l'ayant trouvé dans la chambre de la Reyne. La Cour en partit le 7 pour aller à Richelieu, où elle sejourna le 8; le 9 elle alla coucher à Sé [Ponts-de-Cé], d'où elle arriva le x à Tours, et en partit le 12 pour Amboise et le 13 à Blois, où elle est encores et parle de venir à Orleans, quoy que les habitans tesmoignent à S.A.R. beaucoup de disposition de refuser l'entrée à la Cour. Le comte de Palluau a laissé seule 600 hommes au bourg de St Amand pour tenir Mourron investy, où le sieur de St Paul, mareschal de camp, a esté tué en voulant empescher que le convoy n'y entrat.

M. Faber, gouverneur de Sedan, ayant passé icy, il y a 8 jours, obtient un passeport de S.A.R. pour aller en Cour, où l'on dit qu'il se chargea de faire des propositions d'accommodement en eslognant le cardinal Mazarin, et que le duc d'Amville doit revenir trouver S.A.R. pour ce subject; mais on ne croit pas que la Cour soit en quelque façon disposée d'esloigner ce cardinal, sans quoy il n'y peut avoir de paix.

Le mesme jour, 9, plusieurs bourgeois de Paris feurent trouver S.A.R., et la prierent de vouloir chasser les troupes mazarines qui faisoint de si grandz desordres dans l'Isle de France; à quoy elle leur respondit qu'ilz fissent tenir une assemblée dans l'Hostel de Ville, et qu'ilz luy fissent une deputation afin que les choses feussent dans les termes, leur promettant qu'elle y donneroit bon ordre; à quoy ilz repartirent que l'Hostel de Ville estoit mazarin; et S.A.R. ayant replicqué qu'ilz se devoint adresser au Parlement, ilz luy dirent que c'estoit encor pis; mais elle leur remonstra qu'il estoit necessaire d'y faire desliberer par l'ung ou par l'autre, et il s'en seroit parlé du despuis, si le mareschal d'Aumont et le duc d'Elbeuf n'avoint fait retirer leurs troupes plus loing, comme ilz firent le mesme jour.

Le mesme jour le Parlement s'assembla, et S.A.R. ne s'y trouva pas. Il n'y feut parlé que des rentes de la Ville et des desordres des troupes mazarines, sur lesquelles il feut arresté qu'on deslibereroit le ii; et que le mareschal de l'Hospital, comme gouverneur de Paris, seroit averty de s'y trouver, pour declarer à la Compagnie le subject pour lequel elles estoint venues /43/ si pres de Paris.

Le 10 S.A.R. fit partir les 2 pieces de canon de 12 livres de bale qu'elle avoit choisies icy, dans l'Arsenac, pour envoyer à M. de Beaufort, avec son attirail. Elles sont escortées par 200 chevaux de l'armée du duc de Nemours, lequel partit d'icy le 12 au matin avec le baron de Clinchamp et le comte de Bossu, pour retourner à son armée, qui estoit encor avant hier à Houdan; d'où elle se doit avancer vers Chartres, que S.A.R. a choisy pour sa place d'armes et où M. de Beaufort est arrivé, dès hier au soir, avec ses troupes, lesquelles ne se joindront qu'en cas de besoin à celles de M. de Nemours, afin qu'elles puissent subcister plus commodement, mais elles se tiendront asses proches les unes des autres; cepandant on asseure que M. de Nemours receut icy le mesme jour, une heure avant son despart, des lettres de change de Bruxelles pour 80 mille escus.

Le duc de Sully leve un regiment, en vertu d'une commission de S.A.R., pour la conservation de la ville de Mantes, dont il est gouverneur. Celuy de Corbeil en veut lever un autre pour le mesme subject, mais parce qu'il est frere du president Le Bailleul, on le croit dans les interestz de la Cour.

Le duc d'Elbeuf est retourné en Picardie et le mareschal d'Aumont dans le Boulonnois, avec fort peu de troupes. Le Milord Digby s'est emparé de Dammartin avec 400 hommes, mais il l'est [il est] sur le point de l'abandonner, pour aller joindre M. de Vaubecourt, qui a passé la Marne à Treilleport [Trilport] et l'Lyonne [Yonne] à Montreau [Montereau] avec 1300 hommes, qui vont au rendévous à Boisgency [Beaugency].

Les 4 regimentz que M. d'Espernon envoye de Bourgogne à l'armée mazarine sont passé à La Charité, faisant le nombre de 1400 hommes commandés par le comte de Bussy Rabuttin, gouverneur de Nevers, lequel y en ayant voulu laisser 200 en garnison, la ville ne l'a pas voulu permettre et les a fait sortir de force, comme elle avoit fait ceux de S.A.R., dont ce comte s'estant fort picqués, a menacé cette ville là de feu; mais elle s'en est mocqué aussy bien que de la demande qu'il y a faitte ensuitte d'une contribution de 8000 livres, qu'il en apres moderé à 4 mille livres et dont on ne croit pas qu'il puisse rien tirer.

Le comte de Charost a escrit, de son gouvernement de Calais, que les Anglois avoint esquippé une puissante flotte pour faire une descente en France, mais on ne croit pas encor cette nouvelle.

Le ix S.A.R. eut nouvelle de Bruxelles que le traitté qui avoit esté commencé de la part du cardinal Mazarin avec le duc de Lorraine estoit rompu, et que ce prince avoit de nouveau traitté avec les Espagnolz, et s'obligeoit encor de leur fournir cette année ses troupes, en payant comme auparavant, et de ne faire point de paix sans eux. Il fait esperer à present du secours à S.A.R.; et à cette fin, il a envoyé ses ordres à Fauge, son lieutenant general, qui est en Alsace, de s'avancer promptement en Bourgoigne; et ses [ces] ordres luy ont esté portés par le sieur Le Gran, que S.A.R. luy avoit envoyé, outre M. de Marcheville.

On escrit de Dijon, du x, que le Parlement y estoit assemblé le 9, sur ce que les deux advocatz generaux ayant receu la derniere despesche de S.A.R., et celles du Parlement de Paris, les avoint envoyés au Roy sans les ouvrir et sans le communiquer à la Compagnie, qui fit citter ces 2 personnages de venir au parquet derriere le bureau, pour rendre raison de ce proceddé; mais ayant faict response qu'ilz vouloint estre assis et parler teste couverte, /43v/ et n'ayant voulu y venir autrement, ilz feurent interditz de leurs charges, et arrestés in mente curiae qu'en cas que le Roy envoyat ordre au Parlement de les restablir, on feroit tres humbles remonstrances sur ce subject, et cepandant surcis aux ordres de Sa M.; que M. d'Espernon s'estoit attiré l'aversion de la pluspart des esprits, pour avoir embrassé le party d'ung de ces advocatz generaux nommé Millottes, fort hay dans la province; et que la garnison de Bellegarde continuoit ses courses jusques pres de Dijon.

Apres la redition d'Angers, le comte de Rieux s'estant retiré à Rennes, le mareschal de la Mesleraye escrivit aux scindics de la Ville qu'ilz l'en fissent sortir; lequel en ayant esté prié civiliement, en sortit, ce qui [qu'il] n'auroit pas fait si on luy en eut parlé autrement. Le Parlement de Rennes s'estoit assemblé 6 fois, pour desliberer sur le contrat des Estatz de la province qu'il a receu ordre de la Cour de veriffier, sans prendre cognoissance des affaires des vieux Estatz; mais il n'y avoit encor rien de resolu, à cause des grandes contestations qu'on y avoit eues pour faire sortir de l'assemblée les suspectz, qui sont MM. de Marbeuf, de Coalogon, et Le Duc.

Le comte de Roure, lieutenant general en Bas Languedoch, s'est saisy, pour S.A.R., de la ville de Tournon sur le Rosne, et y a arresté des barques chargées de marchandizes, qui font beaucoup crier les marchandz de Lyon, mais S.A.R. luy a envoyé ordre de le rendre. Cependant il leve des troupes et de l'argent, et se fortiffie journellement.

On escrit de Montauban, du 7, que le comte d'Harcourt ayant passé la Dordogne à Souillac, et le Lot à Cahors, fit garder le port de Nuilla [Auvillar] sur la Garonne par 300 hommes que la ville de Montauban luy donna, et commencea de passer cette riviere le 4; mais il feut contraint de repasser, n'ayant pas asses de bateaux et les troupes de M. le Prince estant de l'autre costé. Il avoit 4 mille hommes, tout cavalerie, lesquelz ont environ 13 mille chevaux qu'ilz ont pris dans tous les lieux où ilz ont passé, et les ont la pluspart chargé de buttin qu'ilz ont fait, ayant partout fait des desordres inimaginables, jusques à amener de force avec eux 5 à 600 femmes, parmy lesquelles il y en a de condition. Ce comte avoit aussy son regiment d'infanterie, qui s'est tout monté, et le marquis de St Luc luy avoit mené 5 à 600 hommes qu'il avoit rallié; mais sur cette aproche, M. le Prince ayant obligé ceux qui [qu'il] tenoit assiegés dans Miradoux de se retirer dans l'esglise, qui est asses forte, laissa là des troupes pour les forcer, soubz le commandement du sieur de Choupes, qu'on mande, despuis, y avoir esté tué, et s'en alla avec le reste, droit au bord de la Garonne, apres avoir renvoyé son bagage à Agen pour livrer batailles au comte d'Harcourt; et pour cest effect MM. de Marchin et Baltazard l'avoint joint, en sorte qu'il y avoit plus de 6000 hommes. Les lettres de Toulouse qui arriverent hier, portent que le comte d'Harcourt estoit descendu à Valence, où il faisoit faire un pont de batteaux, et que les deux armées estoint en presence l'une de l'autre, la Garonne entre deux; que M. de Choisy, chancellier de S.A.R., estoit arrivé à Thoulouse; et que le comte d'Aubigeoux partoit pour aller trouver M. le Prince de la part de S.A.R.

/44/ Le Parlement s'assembla icy le xi, pour desliberer sur les moyens d'asseurer les rentes de la Ville; mais on n'acheva pas, et l'assemblée feut remise au 12, auquel jour cette desliberation feut continuée sans la pouvoir achever. On a remit encor l'assemblée au lendemain.

Le 13 cette desliberation y feut enfin achevée, et arresté qu'on s'assembleroit dans la chambre St Louys, et qu'à cette fin les autres compagnies souveraines et l'Hostel de Ville seroint invittés de s'y trouver aujourd'huy, l'apresdisnée; et cependant l'assemblée remise au 14, pour desliberer sur les moyens d'empescher les desordres des gens de guerre aux environs de Paris, et l'on envoya des deputtés à S.A.R., pour la supplier de s'y trouver; mais le Parlement s'assembla encor hier, et S.A.R. s'y trouva, mais asses tard. Elle promit que ses troupes n'aprocheroint pas de 10 lieues pres de Paris, conformement à la declaration d'octobre 1648; et mareschal de l'Hospital s'estant fait fort d'empescher que celles du Roy en aprochassent aussy, l'on arresta que cette declaration seroit executtée. Les presidentz au mortier y proposerent de faire une nouvelle deputation au Roy pour demander encor l'eslognement du cardinal Mazarin, et l'Advocat General y fit un fort beau discours sur ce subject, mais il n'y eut rien de resolu là dessus, et l'assemblée feut remise à lundy.

La Chambre des comptes resolut hier d'envoyer ses deputtés à la chambre St Louys, mais avec cette restriction: qu'on n'y deslibereroit sur autre matiere que sur celle des rentes et gages des officiers des cours souveraines. La Cour des aydes resolut aussy d'y depputter, sans parler de cette restriction.

/46/ De Paris le 22 mars 1652

Le 15 du courant les deputtés de la Chambre des comptes et de la Cour des aydes s'estantz rendus à la chambre St Louys, M. Menardeau, qui presidoit à cette assemblée comme le plus antien deputté de la Grande Chambre, proposa le suject pour lequel on s'y assembloit; et comme il tascheoit par tous moyens de rompre cette assemblée, il affecta fort de tenir une grande superiorité sur les autres compagnies, et d'en faire peu de cas, ce qui donna lieu à leurs deputtés de s'en offenser; et ceux de la Chambre des contes ayant dit que le secretaire du Parlement qu'on leur avoit envoyé ne les ayant point avertis du suject sur lequel on devoit desliberer, ilz ne pouvoint pas opiner sans en parler à leur compagnie. Ceux de la Cour des aydes dirent la mesme chose, et demanderent communication de l'arrest du Parlement intervenu là dessus. On la leur accorda. Apres une grande disputte qui survient pour sçavoir si on se rassembleroit, il feut arresté qu'on y reviendroit le 19, et que cepandant MM. les deputtés donneroint advis à leur compagnie de ce qui s'estoit passée; sur quoy les 2 semestres de la Chambre des comptes s'estant assemblés le 16, au matin, revoquerent la deputation qu'ilz avoint faitte auparavant à la chambre St Louys, et resoleurent de n'y envoyer plus; mais la Cour des aydes ne laissa pas de resoudre le 18, d'y renvoyer leurs deputtés.

Le mesme jour les habitans de Mantes, allarmés de ce que S.A.R. leur avoit fait demander s'ilz ne voudroint pas bien recevoir garnison de sa part, escriverent sur ce suject au mareschal de l'Hospital, le priant de l'empescher; et aussytost celuy cy envoya ordre au Milord Digby d'y aller en diligence avec ses troupes, pour s'en emparer. Celuy cy ne manqua pas de partir de Dammartin lettre veue, et feut passer à Ponthoise; d'où estant arrivé à Mantes le 17, il y feut receu dans la ville, et ses troupes dans le faubourg; mais il en sortit le lendemain au matin, apres y avoir laissé seulement 20 hommes, et retourna à La Fere, où sont ses quartiers d'hyvert.

M. de Vaubecourt ayant passé la riviere d'Yonne à Montreau [Montereau], y feut joint par le comte de Grandpré, qui n'a pas voulu s'accommoder avec M. le Prince, quoy que S.A.R. luy eut envoyé, pour ce suject, un gentilhomme nommé Montreau [sic], qui n'y avança rien; et il ce [se] trouva qu'ilz n'avoint en tout que 2500 hommes, dont on a despuis detachés 800 chevaux, qui marchent en Bourgoigne et ont leur quartier à Avalon [Avallon] et à Semur, pour s'opposer à l'entrée des troupes lorraines qui viennent d'Alsace au secours de S.A.R., et qui doivent entrer par là. Le reste de celles de Vaubecourt et Grandpré vont joindre l'armée du mareschal d'Hoqaincourt.

L'armée de M. de Nemours decampa de Houdan dès le 13; et ayant joint celle de M. de Beaufort, celuy cy prit l'aisle droitte, et le premier, la gauche. Ilz marcherent ensemble vers ce mareschal, qui estoit avancé à Merescoman avec les troupes qui estoint en Anjou; et pour cest effect ilz arriverent à Claye [Cloyes] le 16, et à Freteval, 2 lieues du quartier de ce mareschal, et qui ne les attendit pas, mais s'advancea à Boisgency [Beaugency], dont il s'empara, quoy que le pont soit rompu despuis longtemps, et quoy que les habitans eussent tesmoigné vouloir tenir /46v/ pour S.A.R., ayant envoyé demander à cette fin 150 hommes à M. de Beaufort, qui ne les y envoya pas, parce qu'ilz n'en vouloint pas davantage, afin d'en estre les maistres, et que ce nombre ne sufisoit pas pour deffendre ce poste. Sur cela, MM. de Beaufort et de Nemours s'avancerent à Raté [Ratis], 5 lieues d'Orleans, pour empescher la jonction de Vaubecourt avec le mareschal d'Hocquincourt. Cette conjoncture a empesché l'armée de S.A.R. de s'emparer de la ville de Chartres, laquelle luy a fourny cependant, pour 20 mille livres, de pain et d'autres choses necessaires; et Sadite A. y a envoyé M. de la Frette, qui en est gouverneur, pour y tenir les espritz dans cette affection qu'ilz ont tesmoigné pour elle.

La Cour estant arrivé à Tours, les evesques qui y estoint, au nombre de 8 ou 9, eurent audiance de Leurs M. le 12, où l'archevesque de Rouen fit une belle harangue en faveur du cardinal Mazarin, dans laquelle il n'y espargna pas le Parlement de Paris, dont il qualiffia les arrestz donnés contre le cardinal Mazarin de temeraire et de barbare, et comparée le Parlement à Cain apres qu'il eut tué son frere Abel; ce qui feut receu avec aplaudissement de tous les Mazarins. Il voulut ensuitte faire imprimer cette harangue, mais ses confreres ne le vouleurent pas souffrir. Pendant les deux jours que la Cour y demeura, l'on remarqua que le cardinal Mazarin et M. de Chasteauneuf s'entrevisiterent 2 fois, mais qu'ilz ne tiendrent que des discours de compliment ou autres indifferentz, sans parler d'affaires du tout. Il y arriva des deputtés d'Orleans, lesquelz y aporterent la lettre que S.A.R. leur avoit escritte, suivant la teneur de laquelle ilz asseurerent le Roy qu'il seroit le tres bienvenu dans Orleans, et le suplierent de n'y point mener le cardinal Mazarin, à cause de la grande aversion que le peuple avoit contre luy, qui pourroint (disoint-ilz) donner suject à quelque rumeur, de n'y mener point aussy des troupes; mais on leur respondit que le Roy y vouloit enterer sans aucune condition. Leurs M. en partirent le 13, comme vous aves sceu, et en passant à Amboise y laisserent le sieur d'Ortis, lieutenant aux gardes, pour y commander avec 2 compagnies des gardes, une françoise et l'autre suisse. Estant arrivés à Blois, elles estoint disposées à en partir le 17 au matin, mais cette resolution feut changée, sur ce que la ville d'Orleans y envoya derechef des deputtés pour le mesme suject qu'elles avoit fait auparavant, ce qui obligea le cardinal Mazarin d'envoyer à Orleans M. Le Gras, maistre des requestes, pour y negotier son entrée; mais S.A.R. en ayant eu advis, y envoya le comte de Fiesque et M. de Granmont, pour y tenir les esprits dans cette disposition de ne recevoir ny cardinal ny troupes.

L'on a mis dans Boisgency [Beaugency] le regiment d'infanterie du sieur Le Rasle, avec quelque cavalerie, le tout ce [se] montant à 400 hommes soubz la conduitte du sieur de Plainville, qui estoit autrefois chambellan de S.A.R., et qui s'est retiré laschement d'aupres d'elle, sans prendre congé et sans sujet de mescontentement, a esté recevoir à la Cour un brevet de mareschal de camp, ce qui a fort fasché S.A.R.

/47/ Les lettres de Bourdeaux du xi portent que M. le Prince avoit levé le siege de Miradoux entierement, pour aller empescher que le comte d'Harcourt n'achevat de passer la Garonne à Auvila [Auvillar], où la pluspart de ses troupes avoint desja commencé à passer, et où les regimentz de Champagne et Lorraine, qui estoint enfermés à Miradoux, le feurent trouver ensuitte, la moitié malades et hors de service; que ce comte les voyant deslivrés, ne jugea pas à propos d'achever de passer cette riviere ny d'attaquer M. le Prince, qui estoit plus fort que luy; que leurs armées estoint encor en presence l'une de l'autre; et que le comte d'Harcourt ayant cepandant envoyé sommer la ville d'Agen de se rendre, elle avoit envoyé sa lettre à M. le Prince sans l'ouvrir, à quoy les lettres du 14 adjoustent qu'il avoit envoyé de mesmes sommer Beaumont de Lomagne, Villeneufve, et autres villes sur la Garonne, qui avoint touttes respondu qu'elles vouloint tenir pour le Roy et pour M. le Prince; et que son armée repassoit la mesme riviere.

La ville de Xaintes s'est rendue à composition à M. du Plessis Belliere; et la garnison, en estant sortie au nombre de 1200 hommes, a esté escortée au bourg; et les troupes qui estoint devant sont allées assieger Talliebourg [Taillebourg], où le prince de Tarente, n'ayant peu s'y jetter, s'est retiré à Brouage. M. du Plessis Belliere voyant qu'il n'y avoit point de troupes de M. le Prince de ce costé là, capables de faire lever ce siege, en a detaché 2200 hommes des siennes, suivant les ordres de la Cour, pour venir joindre le mareschal d'Hocquincourt.

Les lettres de Montauban du 14 portent que le comte d'Harcourt ayant passé la Garonne à Auvila [Auvillar], MM. de Marchin et Baltazard obligerent M. le Prince à lever le siege de Miradoux, qui [qu'il] estoit sur le point de prendre; et que les armées estoint encor dans les mesmes postes à s'observer; que le chevalier de la Riviere estoit dans Beaumont avec 1200 hommes de M. le Prince, et q'ung nommé Silery, de Toulouse, y en avoit amené 50 ou 60 de Thoulouse, où le sieur de Pontac, president en la Cour des aydes de Guyenne et intendant en l'armée du comte d'Harcourt, estoit arrivé pour y demander du canon, et pour affirmer cette ville là dans le party de la Cour, et qu'on n'y avoit encor rien accordé; qu'à Montauban on se fortiffioit tousjours, suivant la priere que le comte d'Harcourt en avoit faitte aux consulz, qu'il avoit fort caressés, particulierement à cause qu'ilz luy avoint fourny du pain et des munitions, et qu'ilz luy faisoint faire quantité d'espées; que les villes de Caussade, Bruniquel, et autres voisines de là, travailloint fort à se fortiffier, suivant la permission qu'elles en avoint eu de la Cour; et que le vicomte d'Arpajou faisoit fortiffier Millaut.

L'on a donné au mareschal de la Mesleraye la commission de generalissime dans les provinces d'Anjou, de Poictou, et du Maine.

Les advis d'Orleans du 20 portent que les deputtés qui estoint allés en Cour y avoint dit à M. le Garde des Sceaux que les habitans de cette ville là, estant bons et fidelz serviteurs du Roy, ne luy avoint pas envoyé cette deputation pour luy proposer aucune condition; mais qu'ayant receu des menaces fort pressantes de S.A.R., en cas qu'ilz vouleussent recevoir le cardinal Mazarin, ilz avoint recours à la bonté de Sa M., la supliant de ne les jetter point dans le peril en y menant ce cardinal; que sur cela, l'on leur avoit refusé l'audiance, parce qu'on ne vouloit qu'ilz /47v/ parlassent de la reception du Cardinal; que la ville ayant tenu une assemblée sur ce suject, M. Le Gras s'y estoit trouvé de la part du Roy, pour l'exhorter à l'obeissance entiere, et MM. de Fiesque et de Grammont de la part de S.A.R., pour l'empescher; qu'à cette fin ceux cy avoint representé que Sadite A. ayant eu jusques icy un soing particulier de proteger les habitans d'Orleans, ayant empesché que son armée n'en aprochat de 4 lieues pres, et leur ayant laissé le choix de faire garde ou de ne la faire pas, elle avoit toujours le mesme soing pour eux; qu'elle leur enjoignoit comme elle avoit tousjours fait, de recevoir Leurs M. avec touttes les soubmissions possibles, mais qu'elle ne pourroit souffrir qu'ilz receussent le cardinal Mazarin; qu'ilz regardent s'ilz sont asses fortz d'eux mesmes pour l'empescher d'y entrer; qu'en ce cas elle le trouvera tres bon, et leur promet qu'au cas qu'on entreprit de les y forcer, ilz seroint secourus à point nommé par tel nombre de ses troupes qu'il jugera necessaire; et que s'ilz refusoint ces expedientz, ilz doivent s'asseurer qu'elle y fera avancer toutte son armée pour les ruiner de la plus cuisante maniere qui ce [se] pourra; qu'ensuitte on s'estoit derechef assemblé là dessus, mais sans rien conclurre, et que les espritz y estoint bien partagés et bien embrrassés. Les deputtés de S.A.R. luy envoyerent hier un courrier, pour demander des ordres particuliers, qu'elle leur envoya aussytost; et l'on croit que les eschevins y seront changés. Le marquis de Sourdis, qui en est gouverneur, est devenu fort suspect à S.A.R., despuis qu'on luy a dit qu'il avoit accepté du cardinal Mazarin un brevet de duc et pair.

On escrit de Dijon que les troupes qui en estoint parties pour aller joindre le mareschal d'Hocquincour, n'avanceoint point, et l'on asseure qu'elles on receut ordre de la Cour de s'aller opposer à l'entrée des Lorrains, aussy bien que les 800 hommes qu'on a detachés des troupes de Vaubecourt; que quelques compagnies du regiment d'Uxelles estant encor à Authun [Autun], les habitans, qui se voyoint obligés à les nourrir apres avoir payé leur subcistance aux receveurs, avoint rompu les coffres de ceux cy et s'estoint saisis des deniers, dont ilz avoint payé les soldatz et rendu le reste au receveurs, ce que M. d'Espernon avoit fait semblant de ne trouver pas mauvais; et que la noblesse y avoit esleu un chef, qu'elle avoit deputté en Cour pour supplier le Roy de faire precompter les payementz faitz sur les tailles, attendu la necessitté du pays.

Les advis de Blois portent qu'on y estoit fort embarrassé de l'affaire d'Orleans, qu'on parloit de retourner à Amboise ou à Tours, et que le prince de Turenne (c'est ainsy que le cardinal Mazarin fait appeller le mareschal de ce nom) devoit commander l'armée mazarine, et le mareschal d'Hocqincourt un corps à part. Le duc de Bouillon partit d'icy le 18 incognito, pour aller en Cour. Les troupes du comte de Palluau sont encor dans la Sologne vers St Laurens des Eaux, au nombre de 1000 hommes, lesquelz y font tous les desordres imaginables.

M. de Longueville a levé soubz main 2 mille fantassins et 1500 chevaux, soubz commission de S.A.R., ausquelz il a donné son attachement, et pretend de ne se declarer ny pour la Cour ny pour les princes, mais de contraindre les deux partis à s'accommoder, puisqu'il n'y a peut reussir par la /48/ mediation qu'il a offerte; mais sa declaration ne peut estre qu'avantageuse au party des princes. Cepandant on luy accorde à la Cour les commissions qu'il demandoit pour lever les gens de guerre, et donne des brevetz de duc à MM. de Matignon et de Beuvron, avec promesse du cordon de l'Ordre du St Esprit.

Les lettres de Thoulouse du 13 portent qu'on avoit renvoyé le president Pontac au comte d'Harcourt sans luy vouloir accorder le canon qu'il demandoit; et que MM. de Choisy et des Ouches y tenoint les espritz affectionnés au service de S.A.R.

Le mareschal de la Motte, manquant de touttes les choses necessaires, a fait demander son congé par 2 fois, pour se retirer, n'esperant pas de pouvoir rien obtenir de la Cour tant que le cardinal Mazarin et M. Le Tellier y seront, puisqu'ilz sont ses antiens ennemis, et qu'ilz ont esté rapellés despuis qu'ilz ont esté en Catalougne.

Le 19 le procureur general de la Cour des aydes, y ayant fait assembler les 3 chambres et demandé qu'on donnat arrest pour empescher que les tailles ne feussent levées par les sieur de Fougerolles et de Chasteauvert, qu'ilz les levoint en Brie en vertu de la commission de S.A.R., il feut arresté qu'on luy feroit des remonstrances sur ce subject; et on luy envoya des depputtés à cette fin l'apresdisnée, ausquelz elle respondit qu'elle ne les faisoit lever que ce qui en pouvoit revenir bon au cardinal Mazarin ou à ses creatures.

Le mesme jour le Parlement s'estant assemblé, parla de desliberer sur la harangue injurieuse faitte à Tours par l'archevesque de Rouen; mais les Gens du roy ayant remonstré qu'on ne pouvoit pas justiffier ce qu'on disoit que par le bruit commung, l'on ne jugea pas à propos d'y desliberer, sans en avoir des preuves convaincantes; mais si cette harangue ce [se] feut trouvée imprimée, les espritz estoint tous disposés à la faire brusler par la main du bourreau. M. Sevin de la Grande Chambre s'estant plant de ce que les troupes de M. de Vaubecourt avoint pillé sa maison, l'on remarqua que M. Le Clerc de Courcelles luy dit qu'il avoit tort de s'en plaindre, puisque M. de Vaubecourt estoit son bon amy, et Mazarin comme luy. L'on remit l'assemblée au lendemain, pour lire les remonstrances par escrit qui ont esté faittes contre le cardinal Mazarin, et l'on deputta vers S.A.R. pour la prier de s'y trouver.

Le 20 le Parlement ayant continué son assemblée, et S.A.R. y estant, M. Foucaut, conseiller, qui s'aperceut que le comte de Chasteauvieux, avec qui il a proces, estoit entré dans la Grande Chambre pour veoir ce qui s'y passeroit, dit qu'il n'y avoit pas moyen d'opiner avec liberté de sufrages, si on ne faisoit sortir ceux qui venoint aux escoutes; sur quoy l'on deputta 2 presidentz pour les faire sortir; et ce comte voyant que le discours de M. Foucaut s'adressoit à luy, le picqua de parolle et luy fit un signe de menace de la main, dont M. Foucaut s'estant plaint et en ayant demandé justice à la Compagnie, il feut ordonné que ce comte en demanderoit pardon au Parlement, et deffenses à tous particuliers d'y entrer ny de se mettre dans les lanternes pendant les assemblées, sur peyne de cent escus d'amande payable sur le champ, ou à faute de payer, que le contrevenant seroit mené dans la Conciergerie; et quant aux different particulier d'entre luy et M. Foucaut, que S.A.R. seroit suppliée de les vouloir accommoder. /48v/ Ensuitte S.A.R. proposa de recevoir M. de Rohan duc et pair, mais il s'y trouva quelques oppositions, quoy qu'asses legere, la principale ayant esté par M. Le Coigneux, qui dit qu'on ne pouvoit pas le recevoir au prejudice de l'arrest qui feut donné au mois de janvier, portant qu'on ne pouvoit recevoir aucung officier de la Coronne tant que le cardinal Mazarin sera en France. Apres cela, l'on parla de la resolution prise par MM. de la Chambre des comptes de n'envoyer plus les deputtés à la chambre St Louys; et l'on resolut d'envoyer un secretaire du Parlement à ces messieurs, pour les invitter derechef, de la part de S.A.R. et du Parlement, d'envoyer leurs deputtés à cette chambre; et quant aux remonstrances par escrit qu'on devoit lire, on les remit au lendemain. Aussytost l'on envoya le secretaire Radigues à la Chambre des comptes, laquelle luy respondit qu'elle y deslibereroit le lendemain, à cause qu'il estoit tropt tard.

Le Parlement s'assembla encor hier, et S.A.R. s'y trouva. L'on y leut premierement les arrestz du Conseil privé et du Grand Conseil, qui cassent ceux du Parlement de Paris donnés contre le cardinal Mazarin, et deffendent de vendre aucung bien de ce cardinal, et de saisir le revenu de ses benefices. Quelques ungs vouleurent excuser en cela le Grand Conseil, disant qu'il avoit peu prendre cognoissance de cette affaire, à cause que c'estoit une matiere beneficielle; mais cette raison ne feut point considerée, et il feut ordonné tout d'une voix que les arrestz du Parlement seroint executtés, sans s'arrester à ceux des conseilz. Ensuitte on leut les remonstrances par escrit, qui feurent trouvées tropt longues et d'ung stile tropt plat. On arresta qu'elles seroint racoursies et mises en plus beaux termes; et apres, on leut celles du Parlement de Thoulouse, et la lettre qui les accompagnoit; et l'on remit l'assemblée à demain, pour desliberer si on les envoyeroit au Roy par des deputtés, par les Gens du roy, ou par un secretaire du Parlement.

L'on a mandé à la Cour les 5 plus antiens conseillers d'Estat, lesquelz sont partis aujourd'huy pour y aller.

S.A.R. ayant eu advis, avant hier, que le comte de Ligniville s'avanceoit vers La Capelle avec 4500 Lorrains qui viennent à son secours, luy envoya les routtes qui [qu'ilz] doivent tenir par le sieur de Vousy, son escuyer ordinaire; et on escrit de Bruxelles, du 16, que le duc de Lorraine y faisoit ses adieux pour y venir luy mesmes, et qu'il avoit mandé à Fauge, son lieutenant general, qui est en Asace [Alsace], de s'avancer par la Bourgoigne avec 4000 autres Lorrains qu'il a.

/50/ De Paris du 26 mars 1652

Vous aures sceu que M. Servient n'ayant peu s'accommoder avec M. Le Tellier, demeura à Saumeur [Saumur] lors que la Cour en partit, et il y est encore; et que le Royne n'a point voulu que M. de Lyonne feut restably.

Le chevalier de Jersay est mort en Anjou, de regret de la disgrace qu'il avoit souferte à la prise du poste de La Pointe.

Le comte de Rieux ayant esté obligé de sortir de Rennes, s'aprocha de Paris pour se mettre soubz la protection de S.A.R., et a demeuré vers Fontainebleau 5 ou 6 jours incognito, sans avoir osé venir jusques icy, à cause de l'aversion que S.A.R. a contre M. d'Elbeuf, son pere; pendant lequel temps la Comtesse sa femme a si bien fait sa cour aupres de Madame, que S.A.R. envoya il y 4 jours un gentilhomme à ce comte pour le faire venir, en suitte de quoy il arriva icy le 22 et feut fort bien receu d'elle.

Le mesme jour l'assemblée de la chambre St Louys se tient encor, et la Chambre des comptes y envoya ses deputtés. L'on entendit les scindicz des rentiers et les adjudicataires des gabelles, qui y desduiserent des raisons, de part et d'autre, touchant le payement des rentes, mais on a remis la desliberation.

La nuict du 22 au 23, un courrier du duc de Lorraine arriva icy, et apporta à S.A.R. la confiermation de la nouvelle qui estoit venue que ce duc vient en personne, avec ses troupes.

Le 23 le Parlement estant assemblé, et S.A.R. y estant, on leut les remonstrances par escrit qui avoint esté corrigées, lesquelles ce [se] trouverent tres fortes; et l'on arresta que l'on insereroit au bas la declaration donnée à la majorité pour l'exclusion du cardinal Mazarin, avec touttes les lettres de cachet envoyées au Parlement pour le mesme subject, et la declaration faitte par S.A.R. apres le retour de ce cardinal. L'on resolut ensuitte de les envoyer au Roy par deputtés, qui feurent choisis par S.A.R. Ce sont le president de Nesmond, MM. Meusnier et Benoise de la Grande Chambre, MM. Bittau et Lottin des Enquestes, et un des Requestes. Il feut arresté que ce president, qui portera la parolle, feroit un petit discours pour preparer l'esprit du Roy à entendre la lecture de ces remonstrances, et qu'au cas que le Cardinal y voulut assister, representeroint à Sa M. qu'estant criminel, il ne doit pas paroistre devant la justice, il la supplieroint de le faire retirer; qu'au reste, ilz ne pourroint avoir aucune communication avec luy directement ny indirectement, ny avec aucung de sa part, ny le veoir quand mesmes ilz en recevroint commandement expres. MM. Doujat, Sevin, et autres, qui ne sont pas Frondeurs, proposerent de charger les deputtés de demander la paix au Roy, en excluant le cardinal Mazarin; mais il leur feut respondu que cela estoit inutile, puisque si le Roy accordoit ce qu'on demande par les remonstrances, il accorderoit sans doute la paix. A la sortie, le peuple cria "S.A.R., point de Mazarin, point de l'Hospital!"

On escrit de Bourdeaux du 18 que les armées de M. le Prince et du comte d'Harcourt ayant /50v/ demeuré 4 ou 5 jours en presence l'une de l'autre, celuy cy fit avancer enfin la sienne, sans que M. le Prince en feut averty, quoy qu'il eut envoyé 4 parties à la guerre pour observer sa contenance, dont pas un ne revient luy en dire des nouvelles; ce qui l'obligea de faire avancer ses gardes et ceux de M. le prince de Conty, qui faisoint environ 300 maistres dans un poste qui couroit son quartier principal, lesquelz laisserent avancer 8 gros escadrons de ce comte, droit au quartier de M. le Prince, qui se resolut alors de se retirer, comme il fit, en bon ordre, et de repasser la Garonne avec la cavalerie, laissant son infanterie dans des quartiers fermes, où elle estoit encor, et Son A. à Agen; que le comte d'Harcourt, ne pouvant empescher cette retraitte, rebroussa chemin, et envoya investir le quartier où les 300 estoint postés, lesquelz, apres quelque peu de resistance, se rendirent à composition d'aller retrouver Son A.; et que, neamoings, en passant dans l'armée du comte d'Harcourt, ilz avoint esté tous despouillés et demontés; que par ce moyen, ce comte estoit maistre de la campagne au dela de la Garonne, où il faisoit des courses partout; à quoy d'autres lettres adjoustent qu'il a prit une piece de canon de M. le Prince, avec 50 chevaux d'artillerie.

En suitte de la declaration faitte de la part de S.A.R. par MM. de Fiesque et de Grammont à l'assemblée de la ville d'Orleans, les espritz y estantz fort embarrassés, et n'osant se declarer ny pour l'ung ny pour l'autre party, resoleurent seulement de tenir une assemblée generalle de tous les Corps de Ville pour y desliberer. Sur cela, M. Le Gras ayant conferé avec le marquis de Sourdis, envoya promptement demander à la Cour une lettre de cachet, portant deffense de tenir cette assemblée generalle, dans laquelle il ne pourroit esperer rien de bon, à cause de la grande aversion du peuple contre ce cardinal; et en mesme temps, MM. de Fiesque et de Grammond envoyerent icy un courrier pour demander un ordre de S.A.R. pour faire tenir cette assemblée, et pour y faire aller M. de Beaufort, afin qu'il confierma les offres qui avoint esté faittes par les deputtés de S.A.R. Cest ordre y estant arrivé le soir du 21, luy firent tenir cette assemblée le lendemain, presque par force, à cause que la lettre du Roy qui en faisoit deffenses y estoit arrivé; et pendant que l'assemblée ce [se] tenoit, M. de Beaufort y arriva et continua les offres de S.A.R.; sur quoy, l'on resolut d'obeir aux ordres de Sadite A., et de la prier de n'y point faire venir de troupes, les habitans se faisant fort d'empescher d'eux mesmes l'entrée du cardinal Mazarin; apres quoy, à la sortie l'on cria "Vive le Roy et S.A.R., et point de Mazarin!" et l'on obligea mesmes M. Le Gras de faire le mesme cry, car autrement il n'y eut pas esté en seurté. Depuis, il n'y a point paru, quoy qu'il y soit encor, dont le comte de Fiesque apporta la nouvelle à S.A.R. le 23 au matin; et M. de Beaufort estant party d'Orleans le soir du 22, apres y avoir laissé M. de Grammont, fit avancer son armée vers Artenay et aux environs, ayant apris que le comte de Palluau s'estoit saisy du passage de Jergeau [Jargeau], au dessus d'Orleans, et ensuitte s'en vient à Paris, où il arriva le 24 au matin /51/ en poste, avec le comte de Tavanes et 7 ou 8 autres, pour disposer S.A.R. d'aller elle mesmes à Orleans, à cause qu'on ne pouvoit pas encor s'asseurer entierement que les habitans d'Orleans ne changeassent point de resolution, que pour tacher d'y faire passer son armée, afin d'aller attaquer ce comte, et empescher la jonction de M. de Vaubecourt avec le mareschal d'Hocquincourt.

Le 24 on eut advis de Bois [Blois] qu'on y avoit fait 3 nouveaux ministres d'Estat: sçavoir, les ducs de Vendosme et de Bouillon, le mareschal du Plessis Praslin, et qu'on parloit de donner la mesme qualité à M. de Turenne; que le mareschal d'Hocquincourt y estoit retourné avec ses troupes, dont une partie estoit logée dans le faubourg de Blois, qu'elles pilloint comme en plaine campagne, et le reste dans les villages voisins; ce qui feut confiermé par M. de Beaufort, qui raconta que cette chasse leur avoit esté donné par un party de 500 chevaux qui [qu'il] leur avoit envoyé, soubz la conduitte du sieur de Ravenelle; qui feut suivy par 300 fantassins du regiment de Languedoch, jusques à demy lieue pres de Blois, où l'alarme en feut si grande qu'on feut sur le point de faire partir le Roy sur le champ; à quoy d'autres adjoustent qu'on y avoit fait reveue, en presence de Sa M., des troupes de ce mareschal, que les plus zelés pour le cardinal Mazarin font monter à 4500 hommes, et les moings zelés à 3000, qui ont tous passé la Loire à Blois pour aller joindre Palluau et Vaubecourt; que M. de Vendosme n'estoit pas encor arrivé à Blois, où l'on le vouloit attirer par la nouvelle qualité de ministre d'Estat qu'on luy avoit donné; et que le prince d'Harcourt y en sollicitoit fort une pareille pour Monsieur son pere.

La Reyne a à la fin accordé, aux instances des Catalans, 200 mille livres des droitz qui viennent au Roy de la derniere prise des vaisseaux espagnolz par les chevaliers de la Ferriere et du Parc, laquelle somme a esté destinée pour l'armement de 8 vaisseaux et 3 brulotz qui doivent aller secourir Barcelonne, qui sont presque toutz prestz, ceux qui vont en course s'estant obligés d'y aller par ce moyen, ce qui fait esperer aux Catalans y estre asses fortz pour faire lever le siege de cette ville là.

Vous avez sceu que le chevalier d'Escars estant prisonner des Espagnolz, Mlle Segur avoit obtenu de la Reyne, dont elle est fille d'honneur, qu'il seroit eschangé avec le comte de St Amour, qui estoit demeuré d'accord de donner 20 mille livres de retour. Sur cela, ce chevalier, qui est à S.A.R., luy dit que si son affaire reusissoit par ce moyen, il ne pourroit avoir cette obligation à la Reyne sans la recognoittre, en se mettant absoluement dans ses interestz; et S.A.R., pour le conserver, escrivit à l'Archiduc et au duc de Lorraine pour obtenir sa liberté gratis, laquelle luy feut aussytost accordé et envoyé la semaine passée.

Le 24 on tient Conseil au palais d'Orleans, pour desliberer si S.A.R. iroit à Orleans. Elle y estoit toutte disposée, mais la resolution feut prise qu'elle y envoyeroit Mademoiselle avec le duc de Rohan, le comte de Fiesque, et quelques autres, pour y tenir les espritz affectionnés à son party; et à cette fin Mademoiselle partit hier d'icy, pour y arriver aujourd'huy.

/51v/ Le mesme jour, 24, S.A.R. ayant aperceut dans son cabinet le secretaire du mareschal d'Estrés, luy parla en ces termes: "Vous estes bien hardy de venir dans ma maison, apres que vostre maistre a si laschement abandonné mes interestz, et violé les parolles qu'il n'avoit données, et que vous m'estes venu confiermer de sa part. Foutes-moy la porte, et sachés que si je vous trouve icy davantage, je vous feray jetter par les fenestres." Ce secretaire alla aussytost raconter cette histoire au comte de Brancas, nepveu de ce mareschal, et luy adjousta que M. de Beaufort, qui estoit avec S.A.R., avoit fort aplaudy à cette action; ce qui donna lieu à ce comte d'envoyer le chevalier d'Escars à M. de Beaufort, pour l'appeller en duel, tant pour ce suject que pour ce qu'il prentendoit que celuy cy avoit empesché que S.A.R. ne le fit servir de lieutenant general dans son armée; mais un exempt ayant entendu une partie des discours du chevalier d'Escars, en avertit Sadite A., qui donna aussytost des gardes à M. de Beaufort, et quoy qu'elle en feut fort faschée contre ce comte, neamoings elle le manda hier au soir, pour accommoder l'affaire; mais comme il avoit grand tort, M. de Beaufort ne le voulu point veoir, et se contenta de donner sa parolle à S.A.R. de n'y songer plus, et de ne se point battre. Le prince de Tarante arriva icy avant hier.

/52/ De Paris du 29 mars 1652

Le comte d'Erval ayant esté envoyé de la Cour à Chartres, sur la fin de la semaine passée, pour tascher d'y persuader les espritz à recevoir le cardinal Mazarin, feut rencontré en chemin par M. de Beaufort, qui ne voulu pas l'arrester, sachant bien qu'il n'y avoit aucune disposition dans les espritz des habitans à l'escouter. Estant dans Chartres, il y voulu presenter les ordres de la Cour pour sa negotiation, lesquelz feurent refusés; et on le mena à M. de la Frette, qui en est gouverneur, lequel luy dit que toutte la grace qu'il luy pouvoit faire, estoit de le laisser sortir par telle porte qui [qu'il] voudroit, et l'obligea de se retirer aussytost. Quelques jours apres, le filz de ce comte, ayant ramassé quelque noblesse aux environs, se presenta à une porte de la ville, pour y entrer avec 150 chevaux; mais on fit une descharge sur luy, qui le contraignit à se retirer plus promptement qu'il n'y estoit venu.

Le 27 un courrier, arrivé d'Orleans, apporta à S.A.R. la copie d'une lettre du Roy, escritte aux habitans de cette ville là, par laquelle Sa M. leur mandoit que n'estant plus besoing qu'elle passe à Orleans, qu'elle s'en va à Sully, où le bien de ses affaires l'appellent; que cepandant elle leur enjoint de ne laisser passer aucune troupes de ses ennemis dans leur ville, de laquelle elle fait esloigner les siennes, afin qu'elle ne soit point foulée; et qu'elle a donné le commandement de son armée au mareschal de Turenne, qui tiendra la main à la faire soulager. Ce courrier apporta d'autres lettres particulieres, qui contenoint que ce mareschal avoit le commandement des trouppes de MM. de Vaubecourt, Grandpré, et Palluau, sans se joindre au mareschal d'Hocquincourt, qui doit commander les siennes separement.

Mademoiselle estant partie d'icy le 25, feut coucher à Chastres [Châtres], et envoya le marquis de Flamarins en toutte diligence à Orleans, pour y porter la nouvelle de sa venue et preparer les espritz à la recevoir. Le 26 elle feut coucher à Thoury [Toury], d'où elle partit le 27; et estant arrivée à Artenay, 5 lieues d'Orleans, elle trouva ce marquis, qui luy venoit porter la nouvelle que le Garde des Sceaux estoit à la porte de la ville, de l'autre costé de la riviere, avec tout le Conseil, où il haranguoit le peuple pour y entrer, et les mareschaux de logis du Roy, qui [qu'il] disoit estre en chemin pour y venir sans le cardinal Mazarin. Aussytost elle monta à cheval et courut au galop jusques au portes d'Orleans, avec une escorte de 500 chevaux. Elle y arriva entre midy et une heure; et les portes estant fermées, on luy dit que l'assemblée de Ville desliberoit si on la laisseroit entrer. Elle attendit plus d'une heure l'issue de cette desliberation, et apres laquelle on luy vient dire qu'on avoit proposé de ne laisser entrer personne de l'ung et de l'autre party; mais apres s'estre fait veoir autour des murailles, le peuple s'y ramassa en grande foule, et contre l'advis de son conseil, elle accepta l'offre qui luy firent les battelliers, de la faire monter par une eschelle sur un ravelin, et de rompre une porte qui y estoit, afin d'entrer par là. Aussytost on la conduisit dans un batteau au pied de ce ravelin, où elle monta par une eschelle apres son escuyer, suivie seulement de Mmes de Fiesque et de Pontereau, et de 5 gentilhommes. Estant sur le ravelin, elle fit rompre cette porte avec des haches; s'estant entré, le peuple l'acceuillit /52v/ avec des grandz aplaudissementz et des cris continuelz de "Vive le Roy et S.A.R.!" et "Point de Mazarin!" L'Hostel de Ville ayant apris son entrée, luy deputta le marquis de Sourdis, le maire, et quelques autres, qui luy dirent qu'ilz avoint refusé l'entrée au Garde des Sceaux et au Conseil, et peu apres firent entrer tout son train.

Le comte de Palluau s'estant emparé par stratageme du passage de Jergeau [Jargeau] sur Loire, au dessus d'Orleans, MM. de Beaufort et de Nemours y devoint hier faire marcher leur armée, pour s'emparer du faubourg qui est deça la riviere, et rompre le pont afin de rendre ce poste inutille.

La Cour estant partie de Blois le 27, feut coucher à Clery, d'où elle avoit resolu d'aller à Sully, en cas qu'elle ne peut pas entrer dans Orleans; mais MM. de Beaufort et de Nemours ayant jetté une garnison dans le chasteau, ont fait rompre les digues, qui ont innondé tous les environs, en sorte qu'on n'en sçauroit aprocher.

Le comte d'Hostel, qui estoit prisonnier dans Arras, s'est sauvé, deguisé en paisan, avec une hoste sur son dos. Il arriva icy le 27.

Les depputtés du Parlement partirent d'icy hier, pour aller porter à la Cour les remonstrances par escrit contre le cardinal Mazarin.

Le comte de Wersouvent, que le cardinal Mazarin avoit fait venir en Cour soubz le tiltre d'ambassadeur du prince de Transsilvanie, pour traitter avec luy afin qu'il luy menat icy 4 mille hommes qu'il commande contre le Turc, n'ayant peu s'accommoder avec ce cardinal à cause qu'il vouloit commander son corps d'armée en corps separé, sans obeir à aucung mareschal de France, s'en est allé tres malsatisfait de S.E., qui luy a manqué de parolle en tout, et s'est allé offrir à M. le Prince, qui a traitté avec luy; et ensuitte il s'est embarqué à Bourdeaux, pour aller faire venir ces 4 mille hommes, avec lesquelz il s'est obligé d'estre dans 2 mois à Stenay.

Les nouvelles de Brisac portent que le sieur de Charlevois y a esté arresté prisonnier par son lieutenant, qui s'est rendu maistre de la place, sur ce qu'il a pretendu, aussy bien que les autres officiers de la garnison, que Charlevois avoit esté gaigné par la mareschalle de Guebrian, qui est retournée despuis quelque temps pour asseurer cette place à la Reyne.

Quoy que les advis de la Cour asseurent que la defaitte des troupes de M. le Prince dans la Guyenne par le comte d'Harcourt a esté grande, neamoings les lettres de Bourdeaux ne font mention d'aucung combat, mais confierment la retraitte de M. le Prince à Agen, ayant mis ses troupes dans les quartiers fermés, et laissant le comte d'Harcourt maistre dans toutte la campagne du Condonmois et de la duché d'Albret, n'ayant pas voulu hazarder un combat avec des nouvelles troupes, contre des vieilles et bien aguerries; que M. le Prince parloit de partir d'Agen, pour venir à l'armée de M. de Nemours, et de laisser M. le prince de Conty pour s'y tenir sur la defensive seulement; que celuy cy estoit, à cest fin, retourné à Agen, /53/ qui craignoit fort d'estre assiegé; et que neamoins les espritz estoint tousjours fort resolus de se deffendre dans Bourdeaux, d'où l'on avoit chassé deux conseillers mazarins, et quelques autres de mesme estoffe.

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