Panat in postcardThe Ranums'

Panat Times

Volume 1, redone Dec. 2014

Contents

Volume 1

Panat

Orest's Pages

Patricia's Musings

Marc-Antoine

Charpentier

Musical Rhetoric

Transcribed Sources


 

Les silences du curé de Panat

À partir du 18 juillet 1880, dans le Livre de la paroisse qu'il rédacte si soigneusement, l'abbé Cayron ne dit rien sur les démarches présentées dans notre page sur la chronologie et le coût de l'église de Panat. On constate une réticence qui contraste fortement avec sa façon habituelle de faire. Ses silences étonnent.

C'est-à-dire, entre 1871 et juillet 1880 Cayron a souvent mentionné les statues ou les ornements achetés par la fabrique ou donnés par des particuliers. Souvent il disait nous, c'est à dire, lui seul, voire lui et la fabrique solidaires: "Mr. le curé a acheté un drap mortuaire"; "nous avons fait l'acquisition d'une garniture de chandeliers"; "nous avons fait l'acquisition d'une bannière"; "les Messieurs du château ont fait don ... d'une statue de st Joseph"; "nous avons remplacé un petit calice ... par un autre calice plus grand"; "l'acquisition par M. le curé de deux costumes d'enfants de choeur"; "la statue en plâtre donnée par Mme Marty placée jusqu'à cette époque sur le tabernacle de l'autel de la ste Vierge en a été enlevée selon les recommendations qui en avaient été faites par Mgr Delalle; et a été placée supportée par une console à l'entrée du chœur, du côté de la chapelle St[e] Anne. C'est là que pendant le mois de mai nous avons élevé un petit monument à la ste Vierge." (1)

Tout change à partir de juillet 1880. Comme il a coutume de faire, Cayron fait des comptes-rendus des retraites paroissiales qu'il a organisées, et il tire des extraits de sa correspondance avec d'autres curés à propos des limites de la paroisse. En revanche, il ne dit rien sur le rôle que lui et la fabrique, ensemble ou séparément, auraient joué dans l'élaboration des plans pour l'église et l'iconographie des vitraux, ni sur leur rôle dans le choix du mobilier, le placement des statues, et la sélection des ornements.

Ce n'est qu'en 1887 qu'il recommence à nommer les donateurs et à faire état de souscriptions organisées par la fabrique: "la chaire ... [pour laquelle on] avait suscité la souscription"; "les autels et l'appareil [?] de communion ont été décorés par M. le curé"; "le baptistaire et le groupe [de figures] ont été payés par M. Causse de Serres en souvenir de la naissance de son fils Albert"; "une belle statue de ste Anne ... provenant de la famile Coupa[t]"; "une pierre tirée de la maison de ste Anne à Jérusalem et apportée par M. Cayron curé lors de son pèlerinage en Terre Sainte en 1881"; "il n'y avait aucune ressource pour faire donner cette fête, quelques paroissiens ont néanmoins apporté des promesses et le curé a fait les grands frais." (2)

Pour résumer: abandonnant les détails abondants qui caractérisent les années 1871-1880 et 1887-1896, Cayron s'enveloppe dans le silence pendant sept ans. Pourquoi? Le Livre de la paroisse de Panat était censé préserver les actions du curé, seul ou de concert avec la fabrique. On s'étonne donc qu'à partir de 1880, l'abbé ne note ni les démarches auprès de l'évêché et de la préfecture, ni le transfert des cloches depuis la vieille église jusqu'à la nouvelle, ni le placement des statues, ni l'acquisition d'un nouveau mobilier. Tout se passe comme si des personnes étrangères à la fabrique et à la paroisse avaient pris en charge la quasi totalité de ces responsabilités: les plans pour le bâtiment, l'iconographie des vitraux, le choix du mobilier, l'achat d'ornements.

Bien entendu, ce n'est qu'une hypothèse. Cette hypothèse se fond toutefois sur quelques mots que l'abbé Cayron a laissé tomber en passant.

Dans son procès-verbal de l'érection et bénédiction du chemin de croix dans la nouvelle église, janvier 1886, Cayron dit que Joseph Touzery est "chanoine honoraire et membre du coumté de Monseigneur." Coumté: selon l'écriture de l'époque, la petite lettre en exposant signfie une abbréviation, et plus particulièrement l'omission d'une voyelle (ou plusieurs voyelles) entre les deux consonnes finales. Bref, il est question d'un coumité, (3) un comité. Un comité créé par Ernest Bourret. Un comité qui avait vraisemblablement pour mission de s'occuper du décor et de l'iconographie de la petite église néo-romane.

Cela expliquerait tout. Et rien. Pour que cet emploi du mot coumité ait un sens, il faudra faire des recherches bien plus poussées sur le cercle ruthénois d'Ernest Bourret.

Notes:

1. Livre de la paroisse de Panat, pp. 53, 57, 58, 62, 63.

2. Livre de la paroisse de Panat, pp. 76, 77, 78-79, 82.

3. Comité vient du mot anglo-norman comite, commetre/cometre. En patois, on disait en 1879: coumétre, coumis, pour commettre, commis. Voir Aimé Vayssier, Dictionnaire patois-français du département de l'Aveyron (Rodez: Carrère, 1879), p. 123.

 

First published 2011 as http://ranumspanat.com/eglise_silences.htm