Source: Hippolyte de Barrau, Documens historiques et généalogiques sur les familles et les hommes remarquables du Rouergue, dans les temps anciens et modernes (Rodez, 1853), I, pp. 666-667.
Le château de Panat couronne le sommet d’un monticule isolé qui s’élève du fond de la vallée et ne tient au massif de la montagne que par une étroite langue de terre. Le village est bâti en amphithéâtre sur un des versans et regarde Cassagnes, situé sur le coteau opposé.
Mais c’est en vain qu’on chercherait à Panat le château féodal dont les anciens titres et la tradition disent la force et la grandeur, qui fut si longtemps peuplé de chevaliers et de donzels, et dont les maîtres, soit qu’ils fondassent ou missent à rançon les monastères, n’avaient point leurs pareils en puissance à plusieurs lieues à la ronde. Des remaniements successifs et multipliés en ont fait un château moderne, sans intérêt pour l’art ni pour l’histoire. Il ne reste de l’ancien édifice que quelques pans de murailles, des tronçons de tours et une petite maison byzantine, remarquable par l’archivolte natée de sa porte en plein-cintre, le cordon finement sculpté qui règne au-dessus des fenêtres et les modillons fantastiques des croisées.
Dès 1567, le manoir primitif était fort délabré, car le sénéchal de Rouergue rendit, cette année, une ordonnance au sujet des impositions qu’il convenait faire pour le réparer. Il y a tout lieu de croire que les principales modifications eurent lieu sous les premiers seigneurs de la maison d’Adhémar, au XVIIe siècle.
Hippolyte de Barrau fournit des précisions révélatrices à propos du château de Panat et de la “petite maison byzantine,” c’est-à-dire, la maison que nous appellons la "maison romane."
Du château, dit-il, “il ne restent que quelques pans de murailles,” et “des tronçons de tours.” Aujourd’hui les “pans de murailles” ne sont plus visibles; on suppose qu’ils — ou les pierres dont ils étaient faits — se cachent dans la base d’un mur de maison ou un mur de jardin. Parmi les tronçons de tour remarqués par H. de Barrau, on peut sans doute compter la base du petit four récemment restauré par les Couderc. La petite tour au-dessus de la maison Lacombe qu’on a démolie dans les années 1960, était-elle aussi un “tronçon de tour”?
Les précisions que Barrau fournit sur la maison romane sont les bienvenues. La maison est, dit-il, remarquable par “l’archivolte natée de sa porte en plein-cintre, le cordon finement sculpté qui règne au-dessus des fenêtres et les modillons fantastiques des croisée.”
On connaît bien cette archivolte natée (ou plutôt “en billettes”) de la “porte en plein-cintre: c’est, bien entendu, la porte romane que les d’Adhémar ont sauvée lors du démantellement de la maison romane vers 1890 et qu’ils ont insérée dans l’élévation du château qui donne sur la terrasse.
En revanche, quel a pû être le sort du “cordon finement sculpté qui règne au-dessus des fenêtres”? (Un cordon est une moulure ou bandeau, saillant et horizontal, décoré ou non.)
C’est à dire que la façade de la maison romane — sans doute celle qui donnait sur le château — était subdivisée en deux niveaux par une bande de pierres sculptées, et ces sculptures étaient particulièrement fines. Or, lors de la destruction de la maison romane les d’Adhémar ont préservé environ une demi-douzaine de grosses pierres sculptées. Selon Louis d’Adhémar, qui se référait à l’histoire orale de sa famille, ces belles sculptures étaient des appuis de fenêtre. Seraient-elles plutot les restes de ce bandeau sculpté? En effet, on imagine sans difficulté — comme un élément de décor qui traverse la façade entière de la maison — toute une rangée de pierres sculptées semblables à ce morceau qu’on peut étudier dans le Musée Fenaille de Rodez. Toute une rangée: oui, car dans les années 1970 il y avait au château de Panat au moins sept de ces pierres sculptés!
H. de Barrau mentionne aussi les “modillons fantastiques des croisées.” (Un modillon est une petite console qui est posée sous le larmier [c’est-à-dire, le bord d’une corniche] pour soutenir la saillie du toit. À l’époque romane les modillons étaient souvent très fantastiques. Ceux de la maison romane étaient sans doute analogues aux modillons qui décorent les églises de Saint-Austremoine et de Perse.
Jusqu’ici aucun modillon n’a été repéré dans les murs ou murailles à Panat. Pour une collection formidable de modillons aveyronnais, voir http://jalladeauj.fr/martin12/index.html