Panat in postcardThe Ranums'

Panat Times

Volume 1, redone Dec. 2014

Contents

Volume 1

Panat

Orest's Pages

Patricia's Musings

Marc-Antoine

Charpentier

Musical Rhetoric

Transcribed Sources


 

Trois tentatives de désenclaver Panat:

2: La Grande Rampe de la Côte de Panat

À la fin du XVIIIe siècle, la "communauté de Panat" était en revanche moins réticente à propos de l'améloriation de plusieurs "rampes" qui existaient déjà sur la côte de Panat. Ces rampes avaient grand besoin d'un "adoucissement," mais elles permettaient aux habitants de monter au causse, y rejoindre les chemins, et les sentiers plutôt sommaires, qui partaient vers Rodez. La communauté a donc concentré ses efforts sur la construction d'une "Grande Rampe"; elle était même prête à participer aux frais, car ce projet faciliterait la circulation locale.

À en juger par les documents qui suivent, il y a un rapport assez étroit entre la construction de la Grande Rampe de la Côte de Panat et la construction du chemin de Rodez à Figeac. En effet, l'administration royale va contribuer aux deux projets, plus ou moins simultanément. Les petites "rampes" existantes seront transformées en une seule "Grande Rampe" qui, pour les habitants de la paroisse de Panat, facilitera l'accès au causse et permettra à joindre, tant bien que mal, la nouvelle "route royale" qui va lier Rodez à Figeac. Cette Grande Rampe conviendra non seulement aux piétons et aux bêtes de somme, mais aussi, semble-t-il, à des voitures à roue petites et légères. Quelle heureuse innovation!

Vers 1770, le travail sur la Côte commence: un document daté le 4 novembre 1787 révèle qu'à partir de 1770, Panat payait à l'administration royale "la somme de quatre cent livres annuelement" pour "faire une partie de la Côte." (À en juger d'un autre document, quand la communauté dit "partie" elle veut dire "une partie des frais," pas "une partie de la côte": rappelons-nous que la Monarchie s'était engagée à payer les deux tiers du montant total.)

Les papiers des d'Adhémar permettent de dresser la chronologie de ces travaux sur la Côte de Panat jusqu'au début du XIXe siècle.

En décembre 1777, le greffier de la justice pour Panat publie un appel d'offre pour cette rampe qui va faciliter la communication entre Panat et Rodez:

"Avis au public
Les consuls de la communauté de Panat, qui ont été autorisés à faire reparer la cote qui va de ce lieu à Rodès, feront procéder à l'adjudication, au rabais, de cet ouvrage, le 24 xbre 1777, à une heure après midi, à la salle de l'hôtel de ville de [la] cité de Rodès. Le Sr Suquet, greffier de la justice de Panat, donnera connoissance à tous ceux qui se présenteront du devis de l'ouvrage, de même que des conditions auxquelles s'en fera l'adjudication, il recevra les offres jusqu'au 24 [sic] xbre, qu'on ne sera plus reçû à en faire qu'à l'hôtel de Rodès."

La Monarchie entre vraisemblablement en action vers la même époque, mais ce n'est qu'en janvier 1781 que François-Laurent Lamandé, ingénieur des ponts et chaussées à Montauban, signe un devis: "Devis des ouvrages à faire en terrasses, maçonnerie à pierre sèche, pavé, empierremens, et autres pendant l'année 1781 ... pour la réparation, élargissement et adoucissement des Rampes de la Côte de Panat." Selon l'Estimation signée par le même l'ingénieur, le project coûtera 3231 livres 4 sous 2 deniers. Panat est censé payer le tiers du montant total, et l'administration royale contribuera "les deux tiers en sus."

Ce devis — dont la transcription est disponible sur une autre page — révèle qu'un chemin vers le causse existe déjà, mais que son tracé défectueux est à corriger. Le nouveau chemin se fera sur l'emplacement et l'alignement existants. Il y aura quatre lacets. Une innovation importante: des voitures pourront monter et descendre ("deux tournants ... seront aggrandis pour la facilité du service des voitures").

Le chemin aura une largeur de seize pieds (un peu plus de trois mètres), et il sera empierré. Il y aura un ruisseau pavé au milieu de la voie, pour l'écoulement de l'eau de pluie. De larges fossés de drainage sont prévus "pour éloigner les eaux de la montagne qui bientôt dégraderaient le chemin." Du côté de la vallée, le mur de soutènement, haut de deux pieds (environ 60 cm) sera "chaperonné avec des pierres arrondies [clouques] ... bien serrées entre elles." Le souci d'efficacité des ingénieurs se voit dans l'Estimation attachée au Devis. Tout est minuté, mesuré, calculé. Par exemple, pour transporter la terre en descendant, ils vont employer un "charriot à bras ou camion conduit par trois hommes, portant 6 pieds cubes [de terre et de pierres], parcourant 8.000 toises [16.000 mètres] par jour ou 1.000 toises par heure, en supposant le temps de la charge et décharge de 4 minutes, où 66 toises [132 mètres] fera à cette distance 24 tours."

Le montant total des travaux: 3231 livres, 4 sous, 2 deniers.

Panat continue à verser sa contribution, mais en novembre 1787, le secrétaire de la communauté atteste qu'entre 1770 et 1787, la communauté a taxé les habitants pour la somme totale de 1920 livres - 843 livres de plus que le tiers prévu par l'Estimation de 1781; mais que l'administration royale n'a pas encore contribué un sou. (En effet, la principale contribution de la monarchie semble s'être limitée aux "Devis" et "Estimation" élégamment calligraphiés et que le comte de Panat conservera dans ses archives!) Surtout, sans le soutien des ingénieurs des ponts et chaussées, le projet avance mal: les terrassements qui se font sous l'égide de la communauté de Panat s'arrêtent, et les améliorations se ruinent avec chaque orage.

Copie d'une lettre de M. Franques, notaire royal et secretaire de la communauté de Panat, en datte du 4 novembre 1787 à Mr le comte d'Adhemar de Panat:

Monsieur,
Au moment que j'ai reçu la lettre dont vous avés voulu m'honorer, je venois de travailler au mémoire que je me suis proposé de presenter à l'administration qui est relatif à toutes les demandes que fait Monsieur de La Valete (Procureur syndic) dans sa derniere lettre. J'expose que la communauté de Panat a imposé en 1770, 1771, et 1772 la somme de quatre cent livres annuelement, ce qui fait seize cent livres; que cet argent a été emploié pour faire une partie de la Cote et que la communauté n'a pas encore reçu le premier sol de la part de l'administration, quoiqu'elle ait promis de donner les deux tiers en sus de ce que la communauté a imposé, et qu'en outre ladite communauté a imposé une somme de cent livres en 1786 et 1787, et qu'elle a deliberé d'en faire autant en 1788, ce qui fera en tout la somme de mille neuf cent livres; et que si l'administration effectuoit ses promesses de donner les deux tiers en sus, ce qui feroit trois mille huit cent livres, la Cote seroit bientot parfaite, au lieu que l'ouvrage qui est déjà fait dépérit journellement, et qu'en conséquence il importe de la rendre parfaite.

Viennent ensuite la Révolution et le Consulat. Or, "la période révolutionnaire n'a pas eu les plus heureux effets sur les routes. Souvent l'entretien cessa. Tout travail fut arrêté de 1795 à 1798; même pendant le Consulat, les fonds promis par le gouvernement ne sont que partiellement payés" (4)

Les travaux sur la Côte de Panat s'arrêtent. La communauté de Panat se sent volée. Elle a déjà versé à l'administration royale la somme de 2900 livres pour la construction et entretien de la Côte. Un feuillet isolé, copié du "Livre de Panat" (perdu), témoigne du désarroi des consuls de Panat vers 1790: "Les consuls de la commune de Panat, dont Caumon l'a été 5 ans, devoient rendre compte à ladite commune de 400 lt imposées chacune de ces années, ce qui feroit 2000 lt et en outre 30 lt imposées pendant 3 ans pour l'entretien de la Côte, ce qui feroit 90 lt."

Peu après la création des préfets en 1800, sous le Consulat, les "propriétaires de la commune de Panat," exaspérés, font appel au préfet:

Au prefet du departement de l'Aveyron
Citoyen préfet
    Les sousignés, proprietaires de la commune de Panat, ont l'honneur de vous exposer que pendant le Regime de l'administration provinciale [c'est à dire, avant la création des départements en 1800], il fut employé des sommes considerables provenant des fonds des attelliers de charité (5) ou de la commune, ou bien des particuliers, sur le chemin allant de Panat joindre la grande route à Rodez, les sommes qui elevent à 3650 lt aujourd'huy. Ces ouvrages negligés sont presque en ruine et ils le seront totalement si on ne s'empresse d'y faire quelques reparations.
     Il fut imposé en 1789 pour continuation de travaux à faire sur le chemin dans le rolle de la commune de Panat une somme de cent livres dont l'emploi n'a pas été fait; il reste entre les mains des percepteurs des années suivantes des fonds appartenants à la commune qui restent oisifs pour elle et dont lesdits percepteurs tirent parti. Veuillez bien, Citoyen prefet, ordonner qu'ils rendent compte pour les fonds provenants de leur relicat, etre employés aux reparations dudit chemin, ainsi que la somme de cent livres et les autres dont ledit percepteur de 1789 restera relicataire d'apres le com[p]te qui lui a eté demandé par le maire de votre part, les sousignés, malgré la detresse dans laquelle les a réduits le defaut entier de recolte de l'année derniere fairont un effort pour aider à ladite reparation de leurs bras et de leurs fonds et ils ne doutent pas que leur exemple ne soit suivi par la tres grande majorité des habitans de la commune.
     Ils attendent avec confiance, Citoyen prefet, que vous accueillerés leur petition et que le chemin dont ils vous proposent la reparation ne restera pas long temps dans le delabrement où il se trouve.
Salut et respect

Après cet appel au préfet, rien!

Une version de la "Grande Rampe" des années 1780 — sans doute une version plus rustique — a toutefois été terminée vers1890. Des recherches plus poussées permettront, peut-être, de déterminer la date de l'achèvement de ce project sempiternel. Pour le moment nous n'avons trouvé que les plaintes des habitants d'Issalinie qui, en 1865, cherchaient à se désunir de Panat pour s'attacher à Balsac. Et pourquoi? Tout simplement parce que Panat "se trouve à 300 mètres au-dessous du plateau de Balsac, et qu'ils ne peuvent y arriver que par des chemins d'une très-forte rampe très-difficiles en été et presque impraticables en hiver." (6) "Très difficiles": est-ce une allusion aux travaux interminables qui effectivement auraient rendu difficile la descente ou la montée de la Rampe? Ou est-ce une simple exaggération qui a pour but de faire fléchir le préfet?

On voit la Rampe dans deux photos. La plus ancienne des deux date d'environ 1886-1890 (7) de toute apparence, les travaux sur la Rampe tirent sur leur fin ou viennent de s'achever et les terrassements ont commencés pour la route entre Panat et Clairvaux.

the new church and the ramp to causse

La rampe a été fortement abîmée dans les années 1950 (?) lors de la création d'un chemin de terre qui est grosso modo parallèle à la Rampe. C'est à dire que le bulldozer a fait basculer en bas des grosses pierres sur lesquelles s'appuyaient la partie supérieure de la Rampe. Cette partie supérieure est devenue un des lacets du nouveau chemin de terre. Seule la partie inférieure restait plus ou moins intacte; elle est vite devenue une montée pour les brebis et un raccourci pour les piétons. Les restes de cette rampe formidable, faite avec tant de peine et de frustrations, sont maintenant envahies par la nature. Depuis quelques années, un gouffre y est apparu: il rend impraticable le chemin, et inutile toute tentative de débroussailler.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Lire d'avantage sur les trois tentatives:

L'Introduction      La Route royale        La "Grande Rampe"    "Le chemin numéro 17"    Les notes

 

First published as http://ranumspanat.com/Panat_desenclave.htm